Que le monde politique, ou plus généralement les lieux de pouvoir, soient entre les mains des mâles c’est incontestable, que les femmes doivent se battre à armes inégales pour s’y faire une juste place c’est un fait, que les inégalités soient criantes est indéniable.
Que Ségolène Royal ait souffert tout au long de son parcours politique, surtout lors de sa candidature à la Présidentielles, je n’en disconviens pas. Cependant, dans ce marigot politique sans pitié, au sein d’un PS nid d’intrigues, de rancœurs recuites, de manœuvres sournoises, d’apparatchiks sans talent, elle ne peut s’exonérer, au nom de sa féminité, de ses propres responsabilités, de ses choix, de ses erreurs, de ses échecs.
Pour avoir pratiqué Ségolène Royal lorsque j’étais Directeur de cabinet je puis témoigner que j’ai rarement vu dans mon parcours sous les ors de la République quelqu’un(e) d’aussi méprisant(e) vis-à-vis de ceux qu’elle considère comme des domestiques, d'aussi impérieuse, d’aussi soucieuse de son intérêt exclusif… Comme pour ses collègues mâles je n’ai jamais cédé à ses diktats pour obtenir des passe-droits pour ses chers électeurs des Deux-Sèvres.
« La ministre a un sens aigu de la hiérarchie- des employés du ministère rapportent qu'elle refuserait d'ouvrir les portes elle-même, ou de s'encombrer de ses documents et autres effets personnels. Comme ce soir du printemps 2000 où, ministre déléguée à la Famille du gouvernement de Lionel Jospin, en panne d'essuie-glaces sur l'autoroute, elle exige qu'une personnalité officielle de la préfecture de Poitou-Charentes vienne la chercher. Au moment d'entrer dans la voiture de secours, d'un geste, elle tend à la sous-préfète, qui a fait le déplacement... son sac à main. »
« Devenue assistante parlementaire en titre à l'été 1996, Évelyne Pathouot est victime quelques mois plus tard d'un accident vasculaire cérébral et verra son salaire « suspendu » en février 1997 pour cause de congé maladie. Elle dénonce l'irrégularité aux services administratifs de l'Assemblée, qui convoquent Royal, «folle de rage ». «Quand je lui expliquai que la suspension d'un mois de salaire était une véritable catastrophe, elle me rétorqua simplement : “Mais Évelyne, vous avez une pension alimentaire !”». Évelyne Pathouot s'interroge : comment une «militante de la cause des femmes (…) pouvait-elle considérer une pension alimentaire comme un privilège et non comme un droit ?»
Lire ICI
« Ces travers pourraient conduire à une multitude de contentieux mais rares sont ceux qui osent briser la loi du silence et porter l'affaire en justice. D'autant que le principe de séparation des pouvoirs interdit tout contrôle de l'Inspection du travail dans les murs des deux Assemblées. Pourtant, certains sont allés au bout de leur démarche. Sylvia Edom, attachée parlementaire de Christiane Taubira d'octobre 2002 à avril 2003, a fini par obtenir, aux prud'hommes, la condamnation de l'ancienne Garde des Sceaux pour licenciement injustifié et par recevoir 5.300 euros de réparation. Les deux ex-attachées parlementaires de Ségolène Royal ont également obtenu, après un très long combat judiciaire, la condamnation de la ministre par la Cour de cassation. Mais ces cas sont isolés. "Personne n'a envie d'attaquer son député de peur d'être définitivement écarté de ce très petit milieu professionnel", constate Mickael Levy, secrétaire général adjoint de SNCP (syndicat national des collaborateurs parlementaires) FO. »
Autre versant occulté par Ségolène Royal : sa gestion de la région Poitou-Charentes
QUAND ROYAL RÉÉCRIT L'HISTOIRE DES COMPTES DE POITOU-CHARENTES
«Un rapport bâclé par une stagiaire venue quelques heures sur place», «officine privée», accusations vicieuses... Il n’a fallu qu’une seule des 290 pages de son livre sorti hier, Ce que je peux enfin vous dire, à Ségolène Royal pour réécrire en trois formules l’épisode des comptes de Poitou-Charentes qui a agité la première année du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine.
«Calomnie», «prétexte pour démolir toutes les actions régionales que nous avions créées, notamment en matière d’excellence environnementale et de démocratie culturelle», Ségolène Royal reste fidèle à la ligne qu’elle tenait déjà en 2016, à une époque où la chambre régionale des comptes épluchait les comptes de la collectivité qu’elle a présidé dix ans: il n’y a rien à voir, rien à redire et toutes les accusations ne sont que règlement de comptes politiques. Histoire de convaincre un lectorat national, qui n’a pas forcément suivi tous les épisodes de ce psychodrame, Ségolène Royal ironise sur l’audit réalisé par Ernst and Young. Le cabinet international est renvoyé au simple rang «d’officine privée»: un rapport qu’elle décrédibilise, estimant qu’il a été effectué en quelques heures par «une stagiaire».
Problème, cet audit avait été effectué sur plusieurs mois, en plusieurs volets: et, surtout, Ségolène Royal oublie totalement de mentionner le rapport de la chambre régionale des comptes dont les conclusions étaient sévères: «l’état des finances de l’ancienne région Poitou-Charentes aurait nécessité à court terme, et ce vraisemblablement dès 2016, des décisions importantes en matière de réduction des dépenses et/ou de modification de la politique suivie auparavant en matière de fiscalité», écrivaient pourtant les magistrats, qui détaillaient par le menu la situation budgétaire «sous tension» de Poitou-Charentes, pointaient du doigt les prêts toxiques et leurs dérives et mettaient en exergue des ratios financiers ahurissants: 19 années pour rembourser la dette, une capacité d’autofinancement négative de 6 millions... En clair, une collective au bord de la cessation de paiement.
Dans le livre de Ségolène Royal, donc, tout ça n’existe pas. Zéro dérive, mais une femme politique courageuse face à un Alain Rousset qualifié de «président (qui m’a accusé) de façon vicieuse». Contacté ce mercredi, Alain Rousset a refusé de commenté ce passage du livre.
Hollande, Macron, Valls, Hulot, Jospin... On a lu le livre de Ségolène Royal, et ils en prennent pour leur grade
- Sur François Hollande
Comme tout le monde le sait maintenant, j'ai été cruellement trahie avant et pendant la campagne de 2007, pour une femme de dix ans plus jeune, elle-même ensuite trompée pour une femme de dix ans plus jeune.
- Sur Emmanuel Macron
On m'a parfois comparée à Emmanuel Macron ou à d'autres, comme surgissant au dernier moment. Rien n'est plus inexact !
- Sur Nicolas Hulot
A mes yeux, chacun des pas en arrière [de Nicolas Hulot] l'a affaibli lui-même et surtout a affaibli la position du ministère pour les arbitrages à venir.
- Sur Manuel Valls
Il me dit que c'est lui le chef. Je lui réponds que je ne trahirai pas la mission qui est la mienne : protéger l'environnement et la santé publique.
- Sur Lionel Jospin
Quelle sagesse ? Il est évident que si, dans son livre, il avait mis le mot 'candidat noir' à ma place, l'auteur de ce chapelet d'injures aurait été renvoyé en correctionnelle pour propos racistes.
- Contre les éléphants du PS qui l'ont "dénigrée" durant la campagne de 2007
Ils ont essayé de me manger, mais ils n'ont pas eu ma peau.
Lire l’intégrale ICI
Ségolène Royal encense Brigitte et Emmanuel Macron
Pourtant, si Ségolène Royal ne semble pas porter le chef de l’Etat de 40 ans dans son cœur, cela ne l’empêche pas de le complimenter sur son couple avec Brigitte Macron. Admirative de leur amour, l’ancienne ministre de l’Ecologie explique dans son livre : « Ce que je trouvais très sympathique et respectable, c'est qu'il ait osé épouser une femme de vingt ans de plus que lui. Je me disais qu'il leur en avait fallu, à tous les deux, de la détermination, du courage, en un mot de l'amour, pour affronter les critiques, les sarcasmes, la bêtise et la méchanceté ». De tendre déclarations, qui devraient ravir la première dame de 65 ans, quelque peu éprouvée par les nombreuses railleries dont elle fait l’objet.
Ségolène Royal dans "Ce que je peux enfin vous dire"
Pour finir une petite anecdote qui traduit bien l’ambiance entre mâles blancs :
Sur le plateau de France Inter, Ségolène Royal l'ex-ministre de l'environnement du gouvernement de Manuel Valls est revenue sur un échange sans filtre entre le Premier ministre d'alors et le futur président, Emmanuel Macron
Celui qui était alors ministre de l'économie, avait expliqué dans la presse que la croissance était en berne. Furieux, Manuel Valls lui aurait alors lancé en plein Palais Bourbon: « Et ta queue, elle est en berne? »
Un mot que Ségolène Royal a pris soin de censurer avec des *** dans son livre... et qu'elle ne s'est pas risquée à répéter au micro de France Inter.