Alors que tout le cheptel journalistique fait le pied de grue en attendant Godot… dans la cité d’Alain Juppé Le directeur de l'office de tourisme de Bordeaux, Nicolas Martin, signe un manifeste pour dénoncer les restaurateurs bordelais qui ne servent aucun vin local à leur carte...
L'office de tourisme dénonce une tendance de plus en plus forte de la part de restaurateurs bordelais qui évitent soigneusement les vins du cru. Il y aurait en effet à Bordeaux « entre 10 et 20 % » de restaurants qui ne servent absolument aucun vin local.
L'interprofession partage cette indignation, et estime que les restaurateurs devraient proposer au moins 50% de Bordeaux.
Nicolas Lascombes, qui exploite huit établissements en Gironde, défend aussi le vin local, mais demande à ce que tout le monde fasse des efforts pour sauvegarder le patrimoine bordelais.
Des quotas, des quotas, dans la capitale d’un vignoble qui exporte le plus de vin.
C’est ridicule et stupide.
« Ce qui agace par-dessus tout le directeur de l’office de tourisme, c’est que « ces établissements se gargarisent de concocter une cuisine élaborée à partir de produits locaux et de saison, et curieusement ne proposent pas de vin local, trouvant plus "branché" sans doute de servir des vins d’Australie, d’Argentine ou du Languedoc ». Il précise qu’il ne « demande pas aux restaurateurs de ne servir que du bordeaux ». Mais, « quand on est à Bordeaux, on se doit de proposer un minimum de vin local. Pourquoi faire venir du vin de Nouvelle-Zélande en avion, alors qu’on en produit ici ? Il y a des enjeux écologiques et économiques derrière cette démarche. »
« Un avis largement partagé par le CIVB. « Chaque restaurant a sa stratégie, concède Christophe Chateau, mais s’interdire de faire du vin local dans la plus grande région viticole au monde, il faut que l’on m’explique quel est l’intérêt ? » Il considère qu’un restaurateur bordelais devrait proposer « au minimum 50 % de Bordeaux. »
À une époque pas si lointaine, lorsque j’allais à Bordeaux, les restaurants ne proposaient que du Bordeaux, si aujourd’hui le vent a tourné c’est que la clientèle, y compris locale, n’y trouve pas son compte. Le désamour, que les grands chefs baptisent : Bordeaux bashing, est une remise en cause du produit lui-même, une distorsion qui ne date pas d’aujourd’hui entre les vins dit prestigieux, inabordables, et les vins plus communs qui ne sont plus au goût du jour.
Pendant trop longtemps les dirigeants interprofessionnels bordelais ont eu un comportement, sûr d’eux et dominateur, qui ne prédispose guère ni à l’anticipation des tendances, ni à des remises en cause. Ils le paient cash et l’initiative d’un manifeste de ce type prend des allures de sauve-qui-peut.
Le grand bouzin qu’est le CIVB, qui possède des moyens financiers non négligeables, en dehors de pondre des plans avec des noms affriolants : Bordeaux Demain, Bordeaux, ambitions 2025, n’a pas produit, pour ne pas fâcher ses mandants, des réflexions et des propositions qui secouent le confort de cette appellation connue dans le monde entier.
Le client a toujours raison, ou presque, même si l’on estime que ce ne sont pas les bonnes, alors plutôt que de geindre, de réclamer des quotas aux restaurateurs du cru, les technocrates privés ou publics feraient mieux de s’intéresser aux mouvements de fond de la consommation du vin dans notre vieux pays et dans le monde.
Bien évidemment, les grands critiques, et les moins grands, ou présumés tels, vont m’objecter qu’il existe d’excellents Bordeaux à des prix raisonnables. Je n’en disconviens pas mais la question n’est pas là. Ne leur en déplaise, pour la plupart leur pouvoir d’influence sur les consommateurs, hormis les grands amateurs, est très faible. La nouvelle génération de buveurs glane ses informations sur la Toile, et, même si c’est regrettable, Bordeaux dans le domaine de la communication n’a pas brillé pour se donner une image plus sympathique, moins hautaine.
CONSOMMATION Le directeur de l'office de tourisme de Bordeaux, Nicolas Martin, signe un manifeste pour dénoncer les restaurateurs bordelais qui ne servent aucun vin local à leur carte... ICI
Mickaël Bosredon
Publié le 08/10/18