Lundi, je reçois un SMS de l'ami Pierre Jancou « … Jacques, un monsieur très classe est venu, suite à ta chronique. Un fervent lecteur alsacien mais qui ne connaît que ta plume. Il était un poil contre les vins nature… »
Alors, alors… je me suis dit que, pour connaître le fin mot de l’histoire, je n’avais qu’à tendre la perche «au monsieur très classe» connu de moi sous le timbre PAX, soit Patrick Axelroud.
Je le fis.
Et voilà, ça donne une chronique de haute volée.
Merci, cher Pax, de soulager mon lourd labeur journalier…
Y m’lâche plus c’Taulier ! C’chais pas si c’est ce statut auto proclamé de mouche du coche qui me vaut cette exigeante attention mais va falloir faire gaffe !
À peine les valises déposées, l’ordre tombe : « Pax, au rapport ! »
Certes j’avais laissé entendre que, sur le chemin du retour, nous irions voir ce qu’il y avait à voir à Châtillon-en-Diois et goûter ce qu’il y avait à goûter : la cuisine d’un certain Jancou.
Nous y fûmes donc, mon épouse préférée et moi. Le Taulier qui, sans doute, a des yeux et des oreilles partout, aussitôt le dos tourné, en fut immédiatement informé ; d’où cette demande (après le pensum, gonflé l’autre, vivement la reprise du boulot !)
En annonçant que nous avions réservé et compte-tenu des chroniques sur Châtillon qui n’arrêtaient pas de tomber, nous précisions craindre, dans ces conditions, de ne pas trouver de place.
Nous ne pouvions mieux dire.
C’est par un direct du droit, suivi d’un sévère uppercut que nous fûmes accueillis à Châtillon et qui nous laissât K.O. debout au point que Marie- Louise déclara ne pas vouloir rester. Je lui rappelai que l’important détour avait pour motif la rencontre avec le sieur Jancou et que je ne partirais pas avant d’avoir satisfait ma curiosité.
Une population souriante nous oriente et nous voilà rendu, quelque peu hébété (K.O. debout vous dis-je.)
J’observe l’ancien bar PMU «Au café des Alpes» avec quelques habitués attablés en terrasse en ce calme et paisible dimanche matin. J’entre et j’aborde, chapeau bas, quelqu’un dont l’assurance et la prestance indique le propriétaire des lieux. Il me confirme être Jancou. Tout en lisant le menu du tableau mural, qui laisse dubitatif, je demande s’il est possible de réserver 2 couverts pour le dîner. Je décline mon identité et l’affaire est dans le sac.
Reprenant un peu, nous nous installons en terrasse et commandons une boisson : jus de pomme au gingembre pour moi et chocolat chaud pour MLA. Nous voyant feuilleter dépliants et prospectus Jancou nous demande où nous déjeunons à midi et nous recommande immédiatement le Mont Barral, aux Nonières, à l’extérieur de Châtillon. Un Logis de France avec tout ce qu’il fallait pour nous requinquer et nous rabibocher avec l’existence. En attendant le soir, montée au col de la Menée (Maman, peur, vertige ! - Je m’arrête pour laisser passer les voitures qui nous croise tant je redoute de serrer trop à droite vers l’à pic pour laisser passer l’autre véhicule)
Redescendu dans le village nous flânons sur les traces du Taulier (cherche Nane, cherche bon chien, qui s’en fout et ne course que les oiseaux – il n’a peut-être pas tort et pense qu’il peut y avoir confusion entre ses proies habituelles et ce drôle d’oiseau de Taulier.)
Le service démarre à 20 h. A 20 h 15 nous pénétrons en salle et demandons où nous avons été installés. Table dressée simplement, menu du soir modifié par rapport à ce que nous pouvions lire le matin. Quelques tablées déjà affairées déclinent leur choix.
Nous commandons.
Pour Marie Louise : Soupe froide au fenouil et jambon de brebis
Karbanatky à la purée de carottes
Clafoutis de mirabelles
Pour Pax : Arancini
Karbanatky à la purée de carottes
Tarte aux mirabelles
Je ne dévoilerais pas ce que recouvre le nom des plats. Pour les amateurs deux alternatives : l’insipide quoiqu’utile Wikipédia ou aller au Café des Alpes écouter Jancou chanter et faire saliver ses convives en décrivant le comment de chaque plat.
Pour la qualité de la cuisine tout était au top. Marie-Louise, cordon bleu hors pair, difficile et exigeante n’a pu que décerner un savoureux sans faute. Le Taulier y a goûté avec bonheur semble-t-il. Pour vous faire une idée exacte, n’écoutez pas n’importe qui, faites le voyage.
Et pour boire ? Pour boire…
La carte des vins est remplie de VDP ! Ça sent le vin nature…
Je fais part de mes réticences à l’attentif Jancou et blablabla et blablabli…
Je sors mon joker, c’est J. Berthomeau qui nous a donné l’envie de venir, comme je lui fais confiance, nous allons vous faire confiance. Et Jancou de me parler avec une gourmandise éclairée de sa carte des vins. Quand il arrive à un Chardonnay nature 2000 *, malgré le prix (au diable les avares et les avaricieux, c’est la fin des vacances etc. etc.) On pourrait aussi parodier l’âne des « Animaux malade de la peste » La soif, l’occasion, l’herbe tendre, et je pense quelque diable aussi me poussant, je passais commande de ladite bouteille.
Un vin nature de 18 ans, « encore jeune » avec une légère pointe d’oxydation qui équilibre le « beurré » du chardonnay. Une super bonne pioche à même de convaincre le plus réticent et opposant aux vins nature. *
Nous ne terminons pas la bouteille et demandons à Jancou de nous la garder au frais pour l’emporter le lendemain.
Ce qui fut fait. Quand il nous vit arriver Jancou était sur le seuil de son café. Il nous remis la bouteille, sans un mot mais avec un œil pétillant mi amusé mi intrigué en tout cas sans malice.
Après 7 heures de route, le vin mis au frais a retrouvé toutes ses qualités, Nature ! 18 ans ! Sans souffre ! Faut le faire !
Dans les observations utiles accompagnant la demande de rapport on a cru devoir rappeler que ce n’est pas d’un 3 étoiles qu’il s’agissait comme pour nous inciter à quelques modérations éventuelles. Est-il ballot, parfois, ce bon Taulier. On n’a pas besoin de lui pour fréquenter ces lieux onéreux, prétentieux et obséquieux. C’est justement des « Cafés des Alpes » au diable vauvert qu’on attend de lui. Il devrait savoir que s’il nous recommandait un coupe-gorge, moi du moins, j’irai me faire couper la gorge en toute confiance et y prendrais sans doute plaisir.
Alors dans la série « Je l’aurai un jour, je l’aurai ! »
C’est pas demain la veille : encore raté !
pax
Lutzelhouse le 21 août 2018
* Le Mazel 2000 – VDP Ardèche – Cuvée Charbonnière
Gérald et Jocelyne Oustric
En 1983 Gérald Oustric et sa sœur Jocelyne reprennent la propriété familiale de 24 hectares (aujourd’hui 30) à Valvignères, petit village au sud de l'Ardèche, pour créer le Domaine du Mazel. Comme la quasi-totalité des vignerons de la région, ils vendent l’ensemble de leur production à la cave coopérative. En 1997, une rencontre avec Marcel Lapierre, illustre vigneron du Beaujolais et Jacques Néauport, vinificateur de légende, va tout changer.
Sur des sols souvent argilo-calcaires, voire résolument calcaires, sont plantés des cépages tels que syrah, grenache, carignan, merlot, cabernet et même le rare et local portan, dont la majorité a plus de cinquante ans. Du côté des blancs, les viognier, chardonnay et grenache blanc ont au moins dix à treize ans et souvent vingt à vingt-cinq ans.
Toutes les cuvées de rouges sont vinifiées en macération semi-carbonique. La vendange est ramassée en caissettes entreposées entre 10 et 15°. Les raisins sont mis entiers en cuve, sans pigeage, pour 30 à 45 jours de macération. Ils sont ensuite pressés à l’aide d’un pressoir en bois vertical. Les fermentations durent de six mois à un an. Tout le processus, y compris la mise en bouteilles, se déroule sans aucun intrant, aucun apport chimique et zéro soufre. Une dizaine de cuvées sont disponibles au domaine, le plus souvent des mono-cépages dont la plupart porte le nom de la parcelle d'origine. Pour les rouges la fraîcheur et le fruité sont résolument le style de la maison ; tandis que les blancs, qui patientent un peu plus en fûts, présentent des notes aromatiques plus évoluées.
Et, fait unique et remarquable, en réduisant sa propre part d’exploitation, Gérald a permis l'installation de nouveaux vignerons comme Andréa Calek, Jérôme Jouret ou Sylvain Bock : un très beau système d'entraide s'est mis en place, notamment pour la vinification qui a abouti à une mise en commun des moyens pour tout ce qui concerne la commercialisation et l'expédition.
Source : La cave des Papilles 5, rue Daguerre, 75014 PARIS - Tél.: 01 43 20 05 74