Comme j’ai l’esprit d’escalier en écrivant ma chronique sur Marc Ogeret, incomparable interprète du Temps des cerises, je me suis dit Taulier va falloir chroniquer et, comme je suis allé au marché j’ai acheté des griottes.
Comme Dali était fou du chocolat Lanvin moi je le suis de l’acidité.
Les griottes sont les fruits du griottier, de son nom botanique Prunus cerasus, aussi appelé cerisier acide ou cerisier aigre. Ce petit arbre forme souvent des buissons au sein de haies à l’état sauvage. Les botanistes pensent que le griottier est le résultat d’une hybridation naturelle entre le merisier, un cerisier sauvage, et le cerisier des steppes, un petit arbuste du nord de l’Asie, il est bien plus résistant au froid que les autres cerisiers. C’est la raison pour laquelle la culture des cerises griottes est aujourd’hui concentrée dans le nord de la France, en Allemagne et dans des pays de l’est de l’Europe comme la Pologne.
Les griottes sont des petits fruits charnus rouges vifs sucrés, juteux dont la chair est molle et acide.
Selon l'encyclopédiste romain Pline, le général romain Lucullus, lors de sa campagne militaire contre le roi du Pont, côte sud de la Mer Noire, aurait découvert et apprécié les cerises de la ville de Cerasus, actuellement, la ville turque de Giresun, et les aurait ramené à Rome en 68 avant notre ère.
De Candolle dans son Origine des plantes cultivées, en 1882 met les points sur les i « il faut dire encore une fois qu'il y avait des Cerisiers — au moins celui des oiseaux — en Italie avant Lucullus, et que l'illustre gourmet n'a pas dû rechercher l'espèce à fruits acides ou amers. Je ne doute pas qu'il n'ait gratifié les Romains d'une bonne variété cultivée dans le Pont et que les cultivateurs ne se soient empressés de la propager par la greffe, mais c'est à cela que s'est borné le rôle de Lucullus »
Il existe plusieurs variétés de griottiers. Leurs fruits ont des propriétés différentes, et ils n’arrivent pas à maturation au même moment.
La plus connue est la Montmorency, dont le jus est clair, est célèbre pour son utilisation en conserve et en eau-de-vie. Cultivée dans cette région du nord de Paris depuis le Moyen-Âge, elle est même mentionnée dans les œuvres de Voltaire et de Jean-Jacques Rousseau.
D’autres variétés sont moins connues, comme la très tardive griotte de la Toussaint, ou la juteuse griotte de Moissac, idéale pour la confiture, alors que les griottes du Lyonnais ou du Nord le sont à l’élaboration d’eaux-de-vie.
L’acidité de la griotte la cantonne le plus souvent à la confection de pâtisseries, de confitures ou d’eaux-de-vie, mais on peut, comme moi la manger nature. Elle est très prisée par les chefs pour accompagner la volaille, caille, pintade, le canard.
Outre les clafoutis et les forêts noires, les griottes se déclinent côté sucré aussi bien en tarte, en cake qu’en compote ou en confiture, en jus et en sirop. Elles fourrent des confiseries au chocolat. C’est avec elles, exclusivement, que l’on prépare les cerises à l’eau-de-vie.
Pour en savoir plus sur les autres cerises c’est ICI
chronique du 26 avril 2014
« Le temps des cerises, c'est court : les variétés précoces arrivent en mai, puis les variétés plus tardives prennent le relais jusqu'en juillet.
C’est la cerise de Céret qui de mai à la mi-juin, est pour nous la cerise primeur. Elle est essentiellement de la Burlat, mais il y a aussi de la Starking Hardy, de la Bigalise, de la Primulat.
Le 17 mai 2013, l’Indépendant titrait « Enfin, les premières cerises de Céret envoyées à l'Elysée ! » la récolte des cerises cérétanes était tardive.
3 grands groupes de cerises :
- les cerises «acides» : griottes et Montmorency, surtout destinées à la préparation de cerises à l’eau-de-vie.
- les cerises «anglaises» : destinées aux conserves, confitures et liqueurs, et assez peu cultivées.
- les cerises «douces» : les bigarreaux et les guignes (qui sont les fruits du Kirsch)
CLAFOUTIS AUX CERISES
« Servi dans sa faïence rustique, il affiche la bonne mine des cerises en billes rubicondes, enchâssées dans leur écrin souple et givrées de sucre cristal.
La pâte jaune et molle, chaude encore, dégage une odeur pleine et réconfortante d’œuf et de lait. Légèrement blondie sur le dessus et tendrement élastique, elle fond dans la bouche, tenant son serment parfumé, son goût d’œuf sucré, subtilement alcoolisé. Puis vient la cerise, plus croquante, dont l’arôme puissant envahit alors les papilles, et que l’on mâche en prenant bien garde de ne pas avaler le noyau. Celui-ci n’est pas là par paresse, dit-on, mais parce qu’il confère au plat une incomparable saveur d’amande fraîche, et, parce qu’en épargnant l’éventration des fruits qui transformerait le gâteau en flaque sanglante, il donne au résultat un aspect plus présentable. Le jeu consiste alors à rouler ce petit occupant dur comme un caillou dans sa bouche, de le tourner, le sucer, le lécher jusqu’à – discrètement – le déposer sur le bord de son assiette… Joie de saison, temps des cerises. »
La fabrication d’eau-de-vie de cerise, le kirsch, notamment, a une longue tradition. La « Kirschwasser-Gesellschaft in Zug », fondée en 1870, commercialise avec beaucoup de succès dans le monde entier le kirsch zougois jusqu’à la fin du 19e siècle. Vers 1915, le pâtissier Heinrich Höhen invente la tarte à la cerise de Zoug. Aujourd’hui, quelques distilleries industrielles et de nombreuses distilleries artisanales produisent plus de 60 000 litres de kirsch par an, dont 15 000 rien que pour la tarte aux cerises de Zoug.