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1 juillet 2018 7 01 /07 /juillet /2018 06:00
« Je suis d’une génération où il fallait faire silence. J’ai fait mes classes dans des écoles catholiques... »

Le grand silence à l’école d’agriculture Notre-Dame de la forêt commençait dès la fin du dîner jusqu’au lendemain matin où nous étions réveillé dans le grand dortoir par un  tonitruant « Dieu soit béni » auquel nous devions répondre « à jamais » en quittant notre lit avant d’allant torse nu, quel que soit la température, faire nos ablutions sous les robinets d’eau froide. Il n’était rompu qu’au moment du petit déjeuner.

 

Bien sûr, nous ne le respections pas toujours, le surveillant ne pouvant tous nous contrôler, mais dans cet internat, comme dans tous les internats, le silence était roi.

 

J’aimais bien ce silence comme une bogue dans laquelle mon imagination, cette folle du logis, s’en donnait à cœur joie.

 

Lire dans le silence, je lis dans le silence et ces derniers mois, sur mon lit, j’ai été gâté.

 

Écrire dans le silence, j’écris dans le silence du petit matin.

 

Le silence : « Comment enquêter sur ce qui touche à l’âme, cette «harpe silencieuse dans l’orchestre de Dieu», selon l’expression d’Henry David Thoreau

 

Chasseur de sensations, l’historien Alain Corbin consacre un livre lumineux au bonheur de se taire, traquant chez les écrivains le sens du silence, sa signification sociétale variable selon les époques.

 

Alain Corbin, Histoire du silence, De La Renaissance à nos jours, 210p. Albin Michel

 

Le silence, ce merveilleux signe de distinction

 

« Mais pourquoi cette chasse au silence, Alain Corbin?

 

«C’est quelque chose qui me tracassait depuis longtemps. J’ai souvent proposé ce sujet à mes étudiants doctorants, en vain. Comme mon livre sur les cloches, celui-ci dérive d’une expérience intime. Je suis d’une génération où il fallait faire silence. J’ai fait mes classes dans des écoles catholiques. Dans les années 1940, nous étions abonnés à l’adoration perpétuelle: on s’agenouillait dans une chapelle face au Saint-Sacrement et pendant une demi-heure, on n’avait pas le droit au moindre bruit. Je me rappelle aussi un voyage que j’ai fait avec mon père, un médecin mulâtre originaire de la Guadeloupe qui s’était établi en Normandie. Il m’a amené au monastère de Soligny-la-Trappe, j’y ai passé trois jours pendant la semaine sainte. J’avais 13 ans et j’étais fasciné par tous ces gens qui se croisaient en silence.»

[…]

« Première conclusion ici : le silence est un signe de distinction, une noblesse en soi. Dans le tintamarre de Paris, cette ville où au XIXe les forges imposent leur fureur dans les immeubles, où les charrois violentent les pavés, l’absence de bruit est un privilège. Et un raffinement. Sous les draps, il est recommandé de se masturber muet comme une carpe. Et quand le besoin se fait de pratiquer cet exercice dans une réunion familiale – mais oui –, il est là aussi exigé de ne rien montrer de son plaisir. Spécialiste du sujet, le docteur Deslandes note ainsi à propos de ces impénitents: «Ils n’exécutent aucun ou presque aucun mouvement, mais il y a dans le maintien, la physionomie, le silence du sujet […] quelque chose d’insolite.»

 

L’article ICI 

 

« De tous les métiers qu’un homme sensible et dépressif peut envisager, peu sont aussi périlleux que celui d’écrivain, un véritable écrivain. Les acteurs sont en première ligne, certes, mais la plupart des dommages surviennent au cours des auditions. Une fois qu’ils ont décroché un rôle, ils peuvent toujours se réfugier derrière un masque. Écrire, c’est se mettre à nu. « Ce sont les poètes qui ont découvert l’inconscient, pas moi », disait Freud, non sans un certain degré de frustration et d’envie. Il s’agit de laisser ses démons se manifester, aussi tapageurs et chaotiques soient-ils, de plonger dans les obscures profondeurs de ce pandémonium dans l’espoir de refaire surface avec quelque chose d’ordonné et de beau. La vie d’un véritable auteur requiert de longues périodes d’isolement. Celle d’un écrivain aussi consciencieux, méticuleux, scrupuleux et enclin à la dépression que Léonard Cohen exigeait une solitude implacable. »

La vie de Léonard Cohen I’M YOUR MAN Sylvie Simmons

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commentaires

P
Silence, que de bruit on fait en ton nom !<br /> " Je cherche le silence et la nuit pour pleurer "<br /> Chimène - le cid - Pierre Corneille
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