Dans le concert convenu et chiant des cérémonies anniversaires du cinquantenaire de mai 68, la petite musique du camarade Ribaut du Monde, décalée, légère – le concept de musique légère m’a toujours étonné – imprégnée de l’ambiance de ce moment étonnant, si peu compris, tordu à toutes les sauces si je puis m’exprimer ainsi à propos de la nouvelle cuisine.
Jean-Claude, en ce temps où la référence au passé pour certains, les vieux, verse dans le c’était mieux avant, alors que les petites louves et les petits loups, dans leur bac à sable, pensent que le monde est né en même temps qu’eux, est pour moi une référence.
Ça sent le vécu.
Jean-Claude témoigne : « j’habitais en 1968 au n°8 de la rue des Ciseaux (6e) et j'étais élève en archi à l'Ecole des Beaux-Arts.
Je n'étais pas sur les barricades, mais j'ai été engagé, en juin, comme chauffeur et garde du corps d'Edgard Pisani qui venait de créer le Mouvement pour la Réforme (MPR) en s'opposant à Pompidou. »
Le 05 mai 2018 Jean-Claude nous a livré une chronique :
MAI 68 : LES TABLES DU QUARTIER LATIN
Comme en mai 68, dans ma bonne ville de Nantes, j’étais plus sandwiches que cuisine bourgeoise, je vous livre cette chronique en vous proposant les 2 tranches de pain beurrées : l’entame et la chute, à vous d’apprécier le jambon et les cornichons.
« Depuis la terrasse du Pactole, au 44 boulevard Saint Germain à Paris, où il observe à l’horizon la foule et la fumée du combat, le 29 mai 1968, Roland Neidhart, un habitué de la maison, se souvient : « Après les pieds de mouton sauce poulette, je venais d’attaquer le poulet Père Lathuile ; tout à coup apparaissent les camions qui conduisaient les « Renault » à la Bastille pour la manif.» Georges Seguy, alors secrétaire général de la C.G.T., avait, lui , pour habitude de déjeuner d’un solide cassoulet chez A Sousseyrac, rue Faidherbe, avant de rejoindre le cortège en voiture avec chauffeur. Pour beaucoup encore, les souvenirs de cet étrange moi de mai, ne sont pas dissociables des tables qu’ils fréquentaient parfois aux cotés des «enragés» et des «katangais.» Le Pactole, ouvert en 1967 était, avec le Pot-au-Feu (1965) de Michel Guérard à Asnières et l’Archestrate (1968) d’Alain Senderens, rue de l’Exposition (7è), les points de repère de ce qu’une poignée d’initiés n’appelaient pas encore la Nouvelle cuisine. »
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« En 1968, une génération de jeunes cuisiniers s’est appropriée la dimension hédoniste et libertaire de « Mai ». Beaucoup ont passé la main. Une nouvelle génération a revendiqué ensuite le droit d’inventaire. »
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C’était après l’attaque de Fauchon par un commando d’une cinquantaine de gus, armés de barre de fer, dirigé par un responsable de la Gauche Prolétariennerépondant au pseudo suggestif de Tarzan. Du pur Sartre, ce cher Jean-Paul, toujours aussi faux-cul, adorait les bons restaurants bourgeois et déjeunait tous les jours à la Coupole. Pierre Overney, qui sera assassiné par le gros bras du service de sécurité de la Régie Renault Tramoni aux portes de l’île Seguin, y participait.
Antoine de Gaudemar, futur complice de Serge July à Libération faisait le guet. Le 8 mai 1970 le commando va rafler champagne, caviar, truffes, saumon, marrons glacés tenant le personnel en respect sous la menace de leurs barres de fer puis tous s’enfuir par le métro, sauf Frédérique Delange, fille de haut-fonctionnaire, qui se fit rattraper par « un cuistot à toque et tablier blanc qui, armé d’une broche à gigot, les avait pris en chasse ».
Le 19 mai, la 24e cour correctionnelle de Paris la condamnait à 13 mois de prison ferme. En ce temps-là la justice était rapide et l’on ne badinait pas avec l’atteinte au « symbole de l’arrogance du fric ». Les « vivres » seront distribués dans les quartiers populaires par les militants de la GP.
La presse « bourgeoise de gauche », Le Nouvel Observateur et L’Express(celui de JJSS et de Françoise Giroud) prit fait et cause pour ces nouveaux « Robin des Bois ». À Jacques Foccart, l’homme du SAC, qui s’inquiète auprès de lui « l’opinion publique semble considérer avec indulgence l’histoire Fauchon. » le président Pompidou répond : « Pour Fauchon, c’est vrai, mais qui puis-je ? Même mon fils, ma belle-fille et une cousine avec qui j’en ai parlé trouvent ça sympathique et j’ai dû les rabrouer pour leur faire sentir que cette affaire était ridicule ».
Dans la Cause du Peuple les normaliens, un peu fâchés avec les tables de multiplication, s’en donnent à cœur joie « Nous ne sommes pas des voleurs, nous sommes des maoïstes. Salaire moyen d’un OS : 3,50 francs de l’heure. Un kilo de foie gras : 200 francs soit soixante heures de travail. Un kilo de cake : 18,50 francs, soit 6 heures de travail. Un kilo de marrons glacés : 49 francs, soit 8 heures de travail. Alors, qui sont les voleurs ? »