Dans le petit commerce d’autrefois, du côté des BOF, des bouchers, des charcutiers, des épiciers… madame Michu, monsieur ne s’abaissant pas à faire les courses, y venaient pour acheter mais aussi pour papoter avec le petit commerçant, s’enquérir de la fraîcheur de ses œufs, de son beurre, de chez qui il avait acheté le cochon dont il avait fait du boudin, de quelle bête venait le paleron pour mettre dans son pot-au-feu et pour le vin en litre étoilé elle s’en foutait car c’était monsieur Michu qui le lichait.
Bref, dans les villages, les gros bourgs, les petites, moyennes et grandes villes, il en était ainsi ce qui ne veut pas dire pour autant que ce qui était vendu par les petits commerçants était bon. Le système de la distribution de l’époque fonctionnait sur l’empilement d’intermédiaires qui collectaient, assumaient la fonction de gros, de demi-gros.
J’ai bien connu ce système avec les marchés du vendredi de la Mothe-Achard : marché au beurre, aux œufs, aux volailles, aux lapins… et, une fois par mois, la foire avec les bovins et les cochons, y’avait pas de moutons dans le coin. Toute une armée de maquignons en blouse noire, avec de gros portefeuilles plein de biftons, des petits et gros rapaces qui faisaient la pluie et le beau temps sur le marché. Au roulement de tambour du garde-champêtre soit ils fondaient sur la belle marchandise qu’ils avaient repérés, les prix flambaient, soit ils restaient entre eux à fumer, laissant les paysannes mariner pour mieux les contraindre à lâcher la marchandise en fin de marché à prix cassé.
Et puis le père Édouard de Landerneau est arrivé bientôt suivi par l’irruption des hypermarchés – gros pourvoyeurs de dessous-de-table pour les élus – plus de vendeurs avec qui papoter, pousser le caddie en toute liberté dans les allées, passer à la caisse avec les prix cassés, charger le coffre sur le parking, bourrer le congélo…
Libre-service mon amour !
Et ce fut l’hécatombe dans les villages, les gros bourgs, les petites, moyennes et grandes villes, partout sauf à Paris où le père Chichi ferma le périphérique à la GD (qui en ce moment revient par la petite porte du commerce de proximité). Il y eu des résistants, surtout dans les grandes villes, jouant la carte de la qualité, mais dans nos belles provinces la bagnole aidant les centres-ville devinrent des déserts pourris et les périphéries des horreurs architecturales.
Qui sont les responsables ?
En premier lieu, nous les consommateurs et, bien évidemment dans la foulée les élus locaux toujours friands de brosser leurs électeurs dans le sens du poil.
Le mal est fait, pousser des ébraiements ne sert strictement à rien, seul le choix individuel est pertinent si l’on veut favoriser le développement des produits de qualité.
M’objecter que c’est là une réflexion de nanti, de quelqu’un qui n’a pas des fins de mois difficiles, est recevable mais à la condition de faire l’inventaire des caddies populaires. Ce qu’ils contiennent n’est pas forcément à l’avantage de leur pouvoir d’achat.
À vouloir tout globaliser, à ne s’en tenir qu’à une vision étriqué du pouvoir du consommateur on se prive de répondre à la question initiale : comment bien choisir son boucher ?
Je laisse de côté les prétendus journalistes de la trempe d’un Périco Légasse qui ne prennent même pas la peine de travailler leur dossier se contentant de dérouler leur logorrhée recuite.
Pour madame et monsieur tout le monde mon conseil est simple : poser des questions à votre boucher, de quartier ou de GD, du genre achètent-ils des carcasses ou des muscles ? D’où vient sa viande, quel éleveur, quel abattoir, quel intermédiaire ?
S’il vous envoie balader, aller voir ailleurs…
Certains bouchers affichent la provenance de leurs bêtes, y’a des labels, des indications géographiques, il suffit d’exercer sa curiosité, de cesser d’acheter à la va vite, conseil que je donne aux retraités, très addicts de la GD, vous avez du temps alors prenez-le au lieu de toujours râler même le samedi où vous encombrez les magasins.
Quand j’écris addict j’ai des preuves : lorsque je séjourne en Corse dans un petit village du littoral, un couple de retraités, au lieu de faire vivre le petit commerce du lieu, prend sa voiture pour faire deux fois 30 km pour aller pousser le caddie dans la GD d’Ajaccio.
Pour conclure, j’en ai ras la coupe de ceux qui traitent les consommateurs comme des assistés à qui il faudrait tenir la main pour qu’ils fassent fonctionner leurs neurones, choisir quoi.
À quand l’instauration de la Sécu alimentaire ?