L'origine du mot « moutarde », viendrait de deux mots latin mustum ardens ) qui signifiaient « le moût ardent » car de tout temps on a préparé la moutarde avec du moût (jus de raisin non fermenté). Ce mot aurait donné ensuite le mot " mustard " en anglais.
Hippolyte Etiennez dans son Livre de la Phagotechnie universelle, avance cette anecdote :
« Pour terminer, disons un mot de la moutarde. Ce ne sera pas la première fois qu’on aura servi de la moutarde après le dîner. Les anciens connaissaient parfaitement cette graine. Pline assure qu’elle est le contrepoison des champignons vénéneux. Mais elle n’a pas toujours porté ce nom de moutarde. On l’appelait autrefois sauve ou sénevé ; ce ne fut qu’en 1392 qu’on la débaptisa. Philippe-le-Hardi, duc de Bourgogne, ayant marché contre les Gaulois révoltés, et Dijon lui ayant fourni pour cette expédition mille hommes d’armes, le duc, reconnaissant, accorda à la ville, entre autres privilèges, celui de porter ses armes avec sa devise moult me tarde. La ville fit sculpter l’un et l’autre sur sa porte principale ; mais un accident ayant détruit le mot du milieu, on ne lisait plus que moult tarde, et l’on donna, par dérision, ce nom au sénevé que fabriquaient en grande quantité les habitants de Dijon.
Ceci nous rappelle une autre anecdote. Un fabriquant de la même ville avait écrit sur sa porte cette phrase : multum tardat divio nixam. Les érudits ne manquèrent pas de s’arrêter devant l’inscription, et se mirent à la torture pour en trouver le sens ; mais ils n’y purent parvenir, et dénoncèrent le fabricant, qui, obligé de traduire son enseigne, le fit ainsi : moult tarde Dijon noise (moutarde dijonnaise).
« L'origine géographique de la moutarde reste imprécise. Certains situent ses origines en Afghanistan entre 5500 et 2300 av. JC. Pour d'autres, elle est de l'est de l'Inde et la Chine. La moutarde brune est maintenant cultivée et utilisée sur les cinq continents dans les régions à climat subtropical tempéré. Mille ans après les Sumériens (3000 ans av. JC) à qui on doit les premières traces de moutarde, cette espèce est cultivée par de nombreuses civilisations (Egyptiens, Grecs, Romains...). Elle fut introduite en Gaule par les Romains il y a environ 4000 ans. La moutarde est connue, dans l'ancien testament, sous le nom de sénevé. L'apôtre Matthieu, nous en parle dans la parabole du grain de sénevé. »
Ce sont vraisemblablement les romains qui importèrent vers la Gaule, l'usage de la moutarde de table. Puis, plus tard Charlemagne recommanda de cultiver cette épice dans tous ses états généraux ainsi que les jardins bordant les monastères en banlieue de Paris. La culture de la moutarde gagne progressivement l'Allemagne puis l'Angleterre. En Europe du nord, une croyance voulait que l'on répande quelques graines de moutarde autour de sa maison pour y chasser les mauvais esprits ...
La moutarde de table s'y adapta facilement : la vigne, mère du vin et grand-mère du vinaigre et la moutarde firent bon ménage. Les graines de moutarde poussaient naturellement en abondance. »
« La moutarde est une plante de la famille des Brassicacées (crucifères) dont les graines servent à fabriquer le condiment du même nom. Pour la fabrication de la moutarde les graines sont d’abord nettoyées puis trempées dans le verjus (le jus acide des raisins n’ayant pas mûri), avant d’être broyées pour obtenir une pâte qui sera tamisée afin d’éliminer les sons puis laissée au repos quelque jours en fûts. La saveur piquante du condiment est due à sa richesse en sénevol, essence issue de la dégradation enzymatique d’un sinigroside contenu dans la graine. Néanmoins, « Il n’appartient pas à tout vinaigrier de faire de la bonne moutarde », c’est pourquoi en France, les moutardiers ou « faiseurs de moutarde » sont reconnus comme tels dès 1412. »
L'implantation des moutardiers en Bourgogne est liée à deux principales raisons :
- l'abondance des vignes offre le verjus nécessaire à la pâte ;
- le sénevé cultivé au 19e s. par les charbonniers de Morvan et de l'Auxois, produisant du charbon de bois pour les premières usines sidérurgiques de Bourgogne (Le Creusot, Montbard, Buffon). En effet, le sénevé poussait très bien sur les sols utilisés par les charbonniers pour carboniser le bois. Depuis longtemps, les charbonniers ont disparu et à présent le sénevé est essentiellement importé du Canada.
« Au XVIIIe siècle, une famille dijonnaise (les Naigeon) donne à la moutarde de Dijon ses lettres de noblesse en la confectionnant non pas avec du vinaigre mais avec du verjus (jus de raisin vert). C'est là toute la spécificité du produit.
« Il n’est moutarde qu’à Dijon »
Dès le seizième siècle, la moutarde de Dijon l’emporte sur toutes les autres. Grimod de La Reynière écrira qu’elle « se distingue encore de beaucoup par son mordant et une saveur piquante ».
Au XVIIIe, la concurrence se focalise entre la moutarde parisienne et dijonnaise. À Paris dominent Bordin et Maille, qui s’intitulait modestement « vinaigrier-distillateur du roi ». Ce dernier diversifie déjà ses produits en proposant de la moutarde à l’ail, à l’estragon, à la romaine, aux truffes…
Au XIXe siècle, Maurice Grey conçoit et réalise à Dijon une machine destinée à améliorer la production et le rendement de la moutarde. En pleine période de développement économique, c'est le succès immédiat pour la moutarde de Dijon. »
Grâce à ce moulin, un homme peut faire 50 kg de moutarde par jour, contre 16 à 17kg avec le procédé manuel. De l'atelier on passe à l'usine qui sera hydraulique à vapeur. Des brevets royaux, on passe à l'ère des brevets d'invention et des expositions universelles, ou chacun concoure pour les médailles les plus recherchées du moment.
Le 20ème siècle connaîtra de nombreux bouleversements, essentiellement économiques. Les réglementations sont de plus en plus strictes, à l'image du décret de 1937 qui a défini les conditions de fabrication et de dénomination des moutardes.
La « Moutarde de Dijon » correspond ainsi à un procédé bien précis. Elle est fabriquée avec des graines de moutarde noire et/ou brune, blutées ou tamisées. Cependant, le consommateur ne doit pas s'y méprendre : il ne s'agit pas là d'une appellation d'origine.
Si quelques fabricants utilisent encore aujourd'hui le procédé traditionnel, c'est à dire le broyage à la meule, la fabrication artisanale tend à disparaître au profit de quelques marques. Amora ou Maille.
La production locale de graines de moutarde ne suffisait plus au développement galopant de l'industrie condimentaire (depuis la révolution industrielle, à partir de 1850). Il a fallu importer des graines. La culture de la moutarde disparut de la région vers 1950, victime de ses faibles rendements. Elle fut remplacée par le colza et le tournesol plus rémunérateurs pour l'agriculteur.
Depuis 2009, il existe une indication géographique protégée (IGP) : la « Moutarde de Bourgogne » Ce produit est confectionné à partir de grains cultivés en Bourgogne.
« Amora Maille et Fallot, trouvant dangereux de n’avoir qu’une seule source d’approvisionnement, décident de relancer la production de graines de moutarde en Bourgogne », raconte Marc Désarménien, petit-fils d’Edmond Fallot et Directeur général de la moutarderie familiale Fallot, installée à Beaune depuis 1840. Une poignée d’agriculteurs se lance dans l’aventure, un programme de sélection variétale permet d’améliorer les propriétés génétiques des graines, et peu à peu, la production renaît. « Aujourd’hui 5 000 hectares sont cultivés en Bourgogne », se réjouit Jérôme Cadet, agriculteur et président de l’association moutarde de Bourgogne.
« Si la moutarde vous monte parfois au nez, sachez qu'elle peut aussi le déboucher en cas de rhume ! »
Utilisée en cataplasmes, cette plante dégage les voies respiratoires, décongestionne les bronches et soulage le nez bouché.
Pour préparer un cataplasme de moutarde, mélangez 2 cuillerées à soupe de farine de moutarde ou de graines de moutarde broyées avec de l'eau tiède.
Appliquez une gaze sur votre poitrine, étalez cette pâte par-dessus et recouvrez d'une seconde gaze. Laissez poser 10 minutes.
Il est normal que ça chauffe. En revanche, si votre peau est irritée, retirez le cataplasme immédiatement.
Ce remède de grand-mère est d'ailleurs déconseillé pour les enfants car les sensations de chaleur peuvent être désagréables.
Pas de moutarde dans la mayonnaise
« Indispensables sauces de notre table, la mayonnaise et la rémoulade ont su s’affirmer pour accompagner nos plats de tous les jours. Pourtant une chose les oppose : La moutarde. En effet, si la mayonnaise se prépare avec des jaunes d’œufs, du vinaigre blanc, du sel et du poivre, la rémoulade suit la même recette au détail près que le vinaigre est remplacé par un scrupule de moutarde ! »
Sources : Histoire de la moutarde Chambre d’agriculture de la Côte d’Or
La Moutarde de Bourgogne maison Fallot.
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