Le sens de l’anticipation n’est vraiment pas le point fort des grands chefs du monde du vin, leur leitmotiv c’est circulez y’a rien à voir, ne venez pas nous emmerder avec vos réglementations à la con, charbonnier est maître chez lui.
Le repli en désordre sur l’utilisation des pesticides est leur dernier combat perdu, le consommateur connaît pas sauf pour l’appeler à l’aide contre les affreux hygiénistes qui leur veulent du mal.
On bétonne, on défend dans les instances européennes l’exception française, le vin produit culturel, l’esthétisme de l’étiquette : pensez-donc la déclaration nutritionnelle et la liste des ingrédients sur la contre-étiquette de la Romanée-Conti ou d’un GCC, vous n’y pensez pas !
À titre personnel, en tant que consommateur, je doute de l’efficacité sur le choix des pousseurs de caddies des listes inscrites en tout petit sur des étiquettes. C’est, comme les messages sanitaires, une forme bien hypocrite de rassurer les consommateurs.
Mais ainsi va le vent de l’Histoire, s’y opposer relève du syndrome de la chèvre de monsieur Seguin. Plutôt que de subir le rouleau compresseur des directives communautaires il eut été plus sage d’anticiper, d’expérimenter dans le pays, qui se dit un grand pays du vin, une information intelligente du consommateur.
La vieille formule qui était le socle des pères de l’appellation d’origine : je dis ce que je fais, je fais ce que je dis traduite dans l’élaboration des vins.
On va m’objecter que je prends le parti des naturistes qui, par construction, disent qu’ils n’ajoutent rien au jus fermenté du raisin.
La réponse est non car, pour eux aussi, la transparence de leurs déclarations sera à l’ordre du jour.
La ligne Maginot, les batailles de tranchées sont mère d’immobilisme et de cuisantes défaites.
L’irruption du digital et sa démocratisation permettait une telle expérimentation via le QR code ou le renvoi au site du vigneron, de le coopérative ou du négociant. Elle ouvrait la voie à une adaptation aux différentes situations.
Aujourd’hui, selon Bernard Farges, président de la CNAOC, le monde du vin doit faire le deuil du zéro renseignement sur les étiquettes de vin.
En effet, la fin du régime d’exemption des boissons alcoolisées pour la déclaration nutritionnelle et la liste des ingrédients est actée. Cependant les modalités règlementaires ne le sont pas.
« Devant l’assemblée générale de l’Organisme de Défense et de Gestion des AOC Médoc, Haut-Médoc et Listrac-Médoc, le même Bernard Farges, président de la Fédération Européenne des Vins d’Origine (EFOW), face à une salle médusée (dixit Vitisphère), a déclaré : « Nous devrons renseigner les calories, probablement les ingrédients. Est-ce que cela sera sur les étiquettes, ou est-ce que cela sera un outil dématérialisé ? Rien n’est décidé »
« Éviter le pire » : devoir mettre à jour pour chaque millésime et cuvée ces données.
« La Commission Européenne a été très maligne sur le coup » ironise Bernard Farges. « Plutôt que de subir les critiques habituelles sur les fonctionnaires européens imposant des contraintes, elle a demandé au secteur des boissons alcoolisées de proposer un texte de sortie de cette exemption… De donner le texte avec lequel nous allons nous flageller »
Étiquetage des boissons alcoolisées : Bruxelles donne un an au secteur pour s’auto-réglementer
La Commission européenne a adopté, le 13 mars 2017, un rapport consacré à la mention obligatoire, sur l’étiquette des boissons alcoolisées, de la liste de leurs ingrédients et de leur déclaration nutritionnelle (C’est le règlement 1169/2011 sur l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires qui établit des règles concernant la mention de la liste des ingrédients et d’une déclaration nutritionnelle.)
Mais en France si nous ne sommes pas très rapide à la détente avons la chance d’avoir des élaborateurs d’un magnifique plan de filière remis au Président Macro, en janvier.
Ces géniaux représentants de la filière vont proposer à la Commission Européenne l’apposition d’un QR Code sur les bouteilles, qui renverra le consommateur vers un site d’informations généralistes. « Mais rien n’empêche un vigneron qui veut aller plus loin de le faire » précise Thomas Montagne président des VIF. « Nous sommes dans les temps. Nous sommes parvenus à un accord et nous remettrons un projet à la Commission le 12 mars » indique-t-il.
Je m’en tiens là.
Ça fait belle lurette qu’une gorge profonde travaillant avec les tacherons de la Commission m’avait alerté pour me dire que les brasseurs et les spiritueux étaient bien plus futés que nos chefs de la filière.
De toute façon tout ça faire prospérer le chiffre d’affaires des labos d’analyse et les boîtes de certification. Quand à vérifier cette masse d’informations je doute vraiment que qui que ce soit puisse contrôler. P’tète bien qu’ils viendront emmerder les naturistes pour qu’ils prouvent qu’ils ne rajoutent rien dans leur jus de raisin fermenté.