Chez nous, au Bourg-Pailler, jamais, de jour comme de nuit, les portes n’étaient verrouillées. Dans la journée, les gens entraient sans frapper ; dès le matin c’était les « bonnes » qui venaient chercher le lait et ragoter, en fin de matinée c’était la factrice lestée d’une énorme sacoche en cuir, qui s’arrêtait prendre son café ; les jours de foire de Mothe c’était une litanie de clients de mon père qui s’égrenait tout au long de la journée soi-disant pour régler mais le plus souvent pour picoler ; y’avait aussi ces dames clientes de ma couturière de mère…
Ce fut pour moi la première école de la sociabilité dans un petit bourg où il ne se passait pas grand-chose mais j’ai appris depuis que s’ennuyer développait l’imagination.
Alors, vous comprendrez aisément que, sur mon espace de liberté, la porte est toujours ouverte pour celles et ceux qui souhaitent s’y exprimer.
Attention, ce n’est pas inscrit Face de Bouc sur le fronton, il ne s’agit pas de prendre ma maison pour un ring de boxe. Liberté d’expression mais dans le respect des opinions des autres, sauf celles qui sentent mauvais.
Les Isarn, Christine et Bernard sont des habitués ; ils aiment venir vous proposer ce qu’ils sont, ce qu’ils aiment, ce qu’ils font, alors je les accueille dans l’esprit du Bourg-Pailler.
Nous sonnons régulièrement à cette porte jamais close pour y raconter d'an en an nos avancées, nos espoirs, nos desseins.
Pour avoir une fenêtre et vous interpeller, nous faire un peu remarquer en sautant parmi la foule, en agitant l'oriflamme de la sincérité.
Ainsi nous revoilà encore mieux campés, quoique au fond nous ne le sachions jamais, nous en doutions toujours, et puis un revers est si vite arrivé.
Animés à l'espoir, au travail Cadablès et son petit monde évolue désormais en agro-écologie vers une conversion absolu, un bio sans fard, un engagement simple, sans prétentions mais à nos yeux essentiel.
Nous le mettons en œuvre, nous en parlons avec nos mots.
Nous avons ré-initié sur nos terres un système de vie. Ce fut l'objet du dernier laïus ici même au sujet de vaches, de veaux, d'insectes, de vignes, de plantes et d'herbes...
La question reste toutefois en suspens : Quelle influence sur les vins ?
D'abord, c'est dire notre objectivité, les vins sont plus fins, certainement plus aboutis, plus digestes. Un supplément d’âme !
Bien que facile et passe partout l’expression nous semble pas trop galvaudé tant nous croyons nos buveurs qui trouvent un plaisir plus délicat à la boisson, nos buveurs qui nous racontent nos vins.
Cette complexité qui s'éveille parfois à qui sait y parvenir et qui s’efface souvent à qui lèche l'étiquette.
Cette boisson possède un mystère curieux et renvoi souvent à son dégustateur l'image qu'il se fait de celle-ci ou de lui-même.
Nos enfants s'y lancent désormais de leur côté, un embryon de seconde génération qui aura moins à défricher et nous verrons ce qui l'en sort avec le temps… Passion transmise qui chez nous devient plus calme, plus sereine, moins extériorisé mais toujours là. Finalement mieux jugulé.
Nos vins deviennent nos ambassadeurs en France, à l’étranger. Nous avons repris, plus mûrit l'écriture de notre blog pour promulguer ce bel effort.
Nous y raconterons aussi, au fil du temps ce qui nous mena au vin par des méandres qui nous échappent encore.
N'hésitez pas ! Lisez nous, nous vous raconterons de temps à autre, sans intrusions, nos pérégrinations et vous reparlerons à l'envi de notre passé insulaire.
Les doutes se dissipent parfois, corde raide de nos folies sur laquelle nous dansons les jours de fêtes et à laquelle nous nous raccrochons les jours de tempêtes.
2015 sera bon. Récemment embouteillé pour trois rouges qui racontent le chemin parcouru à l'abri du volcan.
2016 dort encore dans le chai.
2017 est sur pieds.
L'an qui vient, un de nos fils s'installe en reprenant alentour un vignoble en bio, au cheval, mais ceci fera l'objet d'autres écrits, plus tard.
Le petit monde de Cadablès face au grand monde du vin où il faut à tout instant chercher la sincérité, l'oreille attentive, le palais averti, le journaliste curieux, et le blogueur iconoclaste nous renvoi sur les routes pour sans cesse expliquer notre démarche sereine, pour y toucher le buveur final. Y expliquer sous tous les angles notre vérité, notre angle de vue si particulier.
On laissera les amateurs apprécier, les sommeliers déguster car nous avons un peu de mal pour parler de nos vins et ne voulant surtout pas devenir spécialiste de nous-même.
Le recul sur soi est toujours trop relatif. On fait du vin, on s'y applique afin que nos buveurs y trouvent du plaisir, afin de donner le sourire aux jolies filles, afin d'éthérer subtilement les esprits pour leur donner envie de refaire le monde, ne serais ce qu'un instant.
Nous sommes bien vus dans certain guide, par certain chefs, par de grandes écoles, par pas mal de particulier. Heureusement.
Encore et encor' nous remettrons le fer à l'enclume, l'argile sur le tour pour forger et modeler sur le terrain notre monde intérieur si précieux, si fragile, qui a le mérite d'exister car chaque soir nous le rêvons et chaque matin nous le suons.
Quelques lignes jetés sur un cahier d'écolier, comme avant, et retransmise sur les ondes pour paraître moderne.
Quelques lignes pour vous rappeler notre existence, nos choix, notre engagement pour une culture vivante.
A votre bon plaisir Messieurs, Dames d'un coin de terre sudiste où nos chemins à l'envers croiseront, nous l’espérons vos escapades estivales hors des sentiers trop battus.
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Christine et Bernard Isarn vignerons indépendants Domaine de Cadablès....34 Gabian
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