Ma sainte mère, qui voulait que je grandisse en âge et en sagesse afin d’accéder aux plus hautes marches, m’en a fait ingérer tout au long de ma jeunesse en culottes courtes.
« Longtemps, on a donné de la cervelle aux tout-petits parce qu’elle aiderait au développement des neurones. Ce n’est pas scientifiquement prouvé, mais la croyance subsiste. »
Jean-Jacques Arnoult président de la Confédération nationale de la triperie française (CNTF)
Manger de la cervelle rendrait intelligent ?
Pas sûr !
« Sa consommation est très ancienne. Avant de maîtriser le feu, les primates hominidés savouraient les abats, faciles à mâcher crus. Des tribus primitives ingéraient la cervelle de leurs ennemis pour s’approprier leur force. Jusqu’à ce que des chercheurs découvrent, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, qu’une pratique anthropophage – la consommation de broyats de cervelle humaine – déclenchait une maladie neurodégénérative mortelle, nommée kuru chez les Fore, et caractérisée par de forts tremblements. »
Selon les nutritionnistes, les abats boostent le cerveau.
À Paris, Nicole Tripier,(oui, oui, ça n’invente pas) naturopathe et micro-nutritionniste, estime que la cervelle, riche en protéines, en fer, en vitamine B12 et en phosphore, « contribue à l’oxygénation du sang et apporte de l’énergie. La cervelle contient des acides gras essentiels, des oméga-3 DHA, indispensables au développement du cerveau et aux fonctions d’apprentissage »
Points négatifs ?
« Elle contient aussi du cholestérol, et génère de l’urée et de l’acide urique. »
Mais, et j’ai vécu la séquence au cabinet du Ministre, la maladie de la vache folle, l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), affection dégénérative du système nerveux central due à la consommation de farines animales par le bétail, a entraîné à partir de 1995 une baisse de la consommation de viande bovine, et plus encore d’abats.
La maladie de Creutzfeldt-Jakob, apparue après l’injection à des enfants d’hormones de croissance extraites de cerveaux humains mal stérilisés, a alerté sur le danger lié à l’absorption de cervelle.
En plus, la cervelle est très beurk !
Son aspect visuel est pour beaucoup répulsif parce qu’elle ressemble au cerveau humain, la cervelle suscite souvent le dégoût.
Le bel Aymeric Caron, végétarien, auteur de No Steak (Fayard) l’a fort bien compris, il appuie là où ça fait mal :
« Aujourd’hui, l’industrie alimentaire a choisi de cacher la réalité de ce que l’on mange. Tout est fait pour que la viande que l’on achète n’évoque pas l’animal, afin que les gens aient bonne conscience. Or, avec une cervelle dans son assiette, endroit magique où nichent le savoir et peut-être l’âme, impossible de se voiler la face. »
Pour toutes ces raisons, les chefs de haute-cuisine l’ont rayé de la carte mais, sous l’impulsion de certains résistants, tel Christophe Philippe à Amarante, la bistronomie, petit à petit, ose l’extraire de son purgatoire.
Ainsi, lundi dernier à TABLE, la crèmerie de Bruno Verjus, m’a servi une cervelle absolument fondante et très présentable. Je me suis régalé.
e-santé :
La cervelle est le cerveau des animaux de boucherie. C'est un des abats les plus renommés sur le plan gastronomique.
Son poids et ses saveurs varient selon l'animal dont elle provient. Les cervelles d'agneau et de mouton (100 à 150 g) sont les plus fines. Celle de veau est beaucoup plus grosse (300 à 350 g) mais d'une saveur aussi délicate. Une cervelle de bœuf pèse de 500 à 800 g : elle est moins bonne. Quant à celle de porc, elle est fort peu utilisée.
À préparer avec précaution
Une cervelle doit toujours être : rapidement utilisée après l'achat car c'est un produit fragile ; soigneusement lavée et débarrassée des membranes et des vaisseaux sanguins ; dégorgée pendant 1 heure au moins dans de l'eau vinaigrée.
Nutrition
La cervelle qu'elle soit de veau ou d'agneau n'est pas très riche en protéines. Malgré sa texture très moelleuse, elle ne contient pas énormément de lipides. En revanche, elle est particulièrement riche en cholestérol. Lorsqu'elle est servie avec du beurre fondu, selon la tradition, elle peut alors devenir une vraie catastrophe nutritionnelle. Mais la cervelle n'est pas un aliment de consommation quotidienne : peut-être faut-il ne penser qu'au plaisir de sa dégustation.