(13) le journal d’une nonne de campagne by Adelphine Sarrazin opus 2 « je ne suis pas seul sur la filoche, la maison poulaga est aussi de la partie » Tarpon
Agrippine circulait en Uber et moi en scooter, ça faisait marrer Tarpon que je dise ça, allez savoir pourquoi ?
Et vous ça vous dit quoi ?
Filocher quelqu’un c’est totalement jouissif, surtout lorsque la proie ne se doute rien, faut simplement faire gaffe à ce que ta fiole ne croise jamais son champ de vision. Dans les règles de l’art une filoche se fait à plusieurs, ça je l’apprendrai plus tard
Profitant d’un énième déplacement de la star mondiale du conseil vineux, en Australie je crois, la madame filait vers Paris par le chemin de fer. Comme elle semblait pressée elle avait pris la LGV depuis la gare Saint-Jean de Bordeaux.
J’avais une pensée pour ce pauvre Juppé qui allait réunir ses derniers amis politiques, une quarantaine de juppéistes pourraient participer à ce séminaire, dont l'ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, les 25, 26 et 27 août à Bordeaux, le temps d' « un week-end de réflexion pour faire vivre ses idées ». « Il s'agit d'organiser un rendez-vous annuel d'amitié et de réflexion, sur le modèle de ce que faisait Jacques Delors à Lorient. Cela ne vise pas à structurer un courant », assure le juppéiste Dominique Bussereau. Entre 1985 et 1996 avait lieu chaque fin d'été à Lorient une réunion des « transcourants » PS de François Hollande et Yves Le Drian, sous le parrainage de Jacques Delors.
Avant de monter dans le TGV Agrippine avait fait une escale dans un immeuble de la périphérie. Je notai l’adresse pour vérification. Elle en était ressortie dans une tenue bobo-chic : jeans délavé cisaillé aux genoux, tee-shirt arborant la tronche d’Obama, perfecto et ballerines Repetto, petit sac à dos Kipling, j’ai été à deux doigts de ne pas la reconnaître car elle portait une perruque noire de jais. Je passai l’info par SMS à l’ensemble de la bande. Tarpon en retour : « ça sent le mâle ma gisquette ! »
Dans son Uber aux vitres teintées Agrippine filait vers les beaux quartiers. À notre arrivée à Montparnasse, Lulu, le coursier que Tarpon venait d’embaucher, m’attendait avec mon scooter. Paris au mois d’août est quasi-vide je me contentai donc de suivre la grosse allemande à bonne distance. La course fut courte, l’Uber la déposa devant le George V qui, pour les ploucs qui l’ignorent est situé avenue George V.
Tarpon aurait-il raison : madame venait-elle se faire honorer dans un palace par un jeune voyou, je dis ça vu la dégaine de la madame ? En la voyant entrer prestement je notai dans ma petite tête, ce que j’aurais dû faire dès sa prise en charge à Bordeaux, un détail intéressant : Agrippine ne trimballait, en dehors de son sac à dos, aucun bagage.
Qu’allais-je faire si elle rejoignait, avant le 7e ciel, une chambre du palace ?
Mon inexpérience allait-elle me faire foirer ?
Dans les films noirs, les flics ont toujours des indics pour leur mâcher le travail, moi je ne me voyais pas, la gueule enfarinée, aller demander à l’homme aux clés d’or, où la madame allait se faire tringler.
Mon Dieu que je suis vulgaire ?
Mais, comme j’ai le cul bordé de nouilles, la madame délaissant les ascenseurs filait vers la Galerie.
« Ornée de magnifiques tapisseries flamandes, de tableaux et d'un mobilier datant du XIXe siècle, ainsi que de sublimes objets d'art, La Galerie est à la fois le cœur et l'âme de l'hôtel. Chaque jour à partir de 15h, un pianiste contribue à l'ambiance paisible de ce haut lieu parisien. Confortable et élégante, la Galerie abrite aussi bien les conversations intimes que les repas animés. En été, La Galerie assure un service en terrasse de 12h30 à 22h. »
Agrippine n’était pas attendue mais manifestement elle était connue du personnel qui, dès son arrivée, fut aux petits soins avec elle. Ce n’était pas mon cas, j’étais dans mes petits souliers, des Veja équitables, tout en me disant que mon air nunuche jouait en ma faveur. Je posai mes petites fesses, assez loin d’Agrippine sur l’un des superbes canapés et je me plongeai dans le numéro des Inrocks que j’avais acheté à la gare Saint-Jean.
À mon grand étonnement le garçon ne me demanda pas de lui montrer ma carte d’identité lorsque je commandai un Bloody Mary en début d’après-midi. En me l’apportant, c’était un pépère à la tronche sympathique, il me dit tout sourire dehors « Vous ressemblez à ma fille… ». Dans ma petite Ford d’intérieur je me dis « pas besoin d’indic, le pépère va te dégoiser tout ce que tu voudras… » mais sans pour autant lui tomber de suite sur le râble. Pas de souci, comme nous le disons aujourd’hui, il fut conquis par ma courtoisie.
L’arrivée de deux gus interrompit notre bavette, le premier au teint gris, vouté, flottait dans un costar pas très tendance, sa barbe poivre et sel accentuait les ravines de son visage, sa tronche me disait quelque chose – Tarpon nous avait concocté un trombinoscope des bestiaux du marigot de Bordeaux – était suivi par un colosse sanglé dans un costar noir épaulé sur chemise blanche ouverte, belle gueule, trop, mâchoire carrée, mains battoirs, cheveux ras, sourire carnassier. Ils rejoignirent Agrippine, le vieux lui claqua deux bises, le bellâtre lui secoua la main.
« Suis dans la galerie du George V - deux nouveaux arrivants sur zone – radine pour les prendre en filoche à la sortie »
« Ok, j’arrive » Tarpon
De là où j’étais je ne pouvais, bien sûr, suivre l’évolution de la conversation qui s’était engagée entre Agrippine et la belle gueule, mais à un moment je perçus, à la crispation du visage de celui-ci, qu’elle prenait une tournure désagréable. Le vieux ne mouftait pas, il se liquéfiait. Agrippine, elle aussi semblait n’en mener pas large, ses mains tremblaient. Manifestement il y avait de l’orage dans l’air et mon petit doigt me disait que la proposition de Tarpon y était pour quelque chose.
« Nous avons ferré un gros poisson… »
« Suis en place » Tarpon.
Le grand type se leva brusquement, laissant Agrippine en plan sans même la saluer, suivi du vieux la queue basse. J’avertis Tarpon en lui envoyant la photo de dos des 2 que je venais de prendre lorsqu’ils étaient passés devant moi.
Sur le canapé Agrippine était en charpie, elle pianotait sur son smartphone.
« Réceptionné les poissons, je suis le squale… le vieux est un pourri… nom de code Pourri. » Tarpon
Mon serveur revint vers moi. Je l’entrepris gentiment « ça avait l’air de chauffer à côté ? »
- À qui le dites-vous je n’avais jamais vu monsieur Granjus dans cet état…
- Un habitué ?
- Oui
- Et l’autre vous le connaissez ?
- Non, mais c’est la deuxième fois que je le vois avec la dame et monsieur Granjus. Cette fois-là tout allait bien, ils ont même terminé au Krug.
- Comme quoi, un jour Jean qui rit le lendemain c’est Jean qui pleure.
- Le grand il a un drôle d’accent…
- Ha !
- Je dirais que c’est un serbe.
- Qu’est-ce qui vous fait dire ça ?
- J’ai fait la Légion Étrangère, je suis Sicilien d’origine…
- Mafiosi ?
Il partit dans un grand éclat de rire. Mon smartphone bipa « je ne suis pas seul sur la filoche, la maison poulaga est aussi de la partie » Tarpon
(14) quelle brigade était sur le coup : à priori la BRB mais il valait mieux que ce soit confirmé…
Je chevauchais un Cityscoot électrique. La maison poulaga, devant moi, se trimballait dans une voiture banalisée. À vue de nez il ne m’avait pas repéré car mon gros pif les avait flairé dès que le bellâtre avait planté le Pourri sur le trottoir du George V avant de s’engouffrer dans un taxi. Notre affaire se corsait. Aadvark avait vu juste « ça sentait mauvais »
Mes interrogations du moment :
- est-ce que sa moitié jouait solo ou n’était-elle que le porte-parole d’Aadvark ?
- dans les 2 cas de figures : qui avait contacté qui dans cette affaire ?
J’optai pour l’hypothèse la plus logique : madame, via le Pourri, devait avoir été mise au parfum de la proposition par le grand que je filochais… restait à savoir pourquoi elle n’en avait rien dit à Aadvark – pure intuition de ma part mais étayée par le fait qu’il ait mis cette andouille de Touron sur l‘affaire dès qu’il en avait été informé par Parker-Parker&Parker – et pourquoi aujourd’hui elle venait benoîtement de révéler, au bellâtre, notre proposition de même nature. Ce n’était pas raccord.
C’était le bordel, un bordel qui dépassait toutes mes espérances.
Autre interrogation plus immédiate : « pourquoi les flics pistaient-ils l’objet de ma filoche ? »
Gros poisson sans aucun doute, Marie, qui a ses entrées place Beauvau, allait devoir nous aider à identifier quelle brigade était sur le coup : à priori la BRB mais il valait mieux que ce soit confirmé pour que nous puissions aller à la pêche aux renseignements sur notre homme.
Le taxi s’arrêta à l’embouchure de la voie « Villa Émile Loubet », à la Mouzaïa. Dans mes souvenirs d’écolier, la Mouzaïa c’était l’Algérie, le col de la Mouzaïa, le duc d’Aumale, sous les ordres du duc d'Orléans commandant en chef, combattant la Smalah de l’émir Abd-el-Kader qui inspira aux zouaves du maréchal Bugeaud le chant de l’Armée d’Afrique : « La casquette du père Bugeaud » que j’avais braillée au temps de mes culottes courtes.
« Villa Émile Loubet » la République troisième du nom et ses présidents oubliés : Félix Faure, Sadi-Carnot et Armand Fallières mais aussi les poètes Rimbaud, Verlaine, Monet, Laforgue qui voisinaient avec les rues de la Liberté, de l’Egalité, de la Fraternité et du Progrès, la République, toujours la République et ses valeurs.
Là, dans le haut du 19ème arrondissement, se nichait une oasis, un petit bout de campagne à Paris, des fleurs, des oiseaux, des voies pavées, 250 maisonnettes habitées à la fin du 19ème siècle par les ouvriers qui travaillaient dans les carrières de gypse et de meulière du quartier. Le gypse des Buttes Chaumont, d'excellente réputation, chauffé à 120 ° dans des fours, donnait un plâtre de grande qualité et la légende, à tort, affirme que celui-ci fut exporté aux États-Unis pour édifier la Maison Blanche, à Washington. En témoigne une rue des Carrières d'Amérique, celle-ci plongeait à pas moins de 1000 mètres de profondeur, étayée par d’énormes piliers soutenant des voûtes hautes de 15 mètres ; des cathédrales !
Le lieu n’allait pas être facile à surveiller, une coopération avec les limiers de la BRB s’imposait : je filai sur mon scooter électrique jusqu’au premier café pour actionner d’urgence Marie. Quelle ne fut pas ma surprise, alors que je venais tout juste d’entamer mon demi de bière, de voir se pointer deux mecs caparaçonnés en motard. Ils ôtèrent leur casque, me firent un petit signe de tête, auquel je répondis, puis allèrent s’asseoir à une table qui me faisait face.
D’où sortaient ces deux zèbres ?
Mon flair de vieux clebs ne me menait pas sur la piste de keufs modèle classique mais plutôt vers les sentiers des limiers de la sécurité intérieure, l’ex DST. Je devais les avoirs au cul depuis le George V. Question « qu’est-ce qu’il foutait là ? »
Sans doute faire pipi autour de leur territoire, me foutre la pétoche pour que je ne vienne pas fourrer mon groin dans cette affaire qui, manifestement, intéressait beaucoup de monde.
Que faire ?
Me tirer la queue entre les jambes !
Hors de question, la meilleure défense c’est l’attaque, je sirotai ma bière puis me levais pour rejoindre leur table.
« Eugène Tarpon II, conseil en affaires réservées, si ça ne vous dérange pas j’aimerais discuter le bout de gars avec vous camarades ! »
Je suis sûr que Bernadette Soubirous ne fut pas plus surprise qu’eux lorsque la Vierge Marie se pointa dans la grotte de Massabielle.
(15) le journal d’une nonne de campagne by Adelphine Sarrazin opus 3 « Faut te calmer ma grande, t’es pas dans un film, tu mets tes pompes dans la réalité… »
Mimmo, le serveur du George V, mon nouvel ami, fut intarissable sur monsieur Granjus qui, selon lui, passait sa vie à faire banquette dans la galerie du George V. « Il joue les importants mademoiselle mais vous avez vu ses pompes. Des écrase-merde ! C’est une planche pourrie… » J’opinais. Nous échangeâmes nos O6.
La châtelaine éplorée raquait, ces salauds lui avaient laissé la douloureuse. Alors qu’elle passait devant moi, décomposée, les yeux rougis, je décidai, puisqu’elle occupait une place centrale dans cette affaire, de lui donner un nom de code. Ce serait Ricotta.
Pseudo qui n’a rien de vulgaire, ma référence est littéraire, sarde, La comtesse de Ricotta de l’incomparable Milena Agus. « La splendeur ancienne n’est plus, le palazzo familial se délabre, la plupart des appartements ont été vendus et les trois sœurs se partagent ceux qui restent. Seule l’aînée, Noémie, rêve de reconquérir le faste perdu et de restaurer la demeure sur les hauteurs de Cagliari. Les deux autres s’accommodent de la déchéance. Le sujet sur lequel en revanche toutes les trois s’accordent est l’amour imparfait.
Toujours imparfait. Pour Maddalena, qui s’adonne avec persévérance à une sexualité fiévreuse, le désir d’enfant n’est pas satisfait. Pour Noémie, l’objet de l’amour est fuyant et dédaigneux. Quant à la plus jeune, la fragile comtesse de Ricotta, on dirait que la vie entière lui échappe. Comme les objets de ses mains maladroites. Comme l’étrange petit garçon qu’elle élève seule. Mais peut-être que l’espoir se cache tout près, juste de l’autre côté du mur. »
J’informai le réseau du nom de code de la dame d’Aadvark
Je claquai deux bises à Mimmo avant de suivre les belles fesses de Ricotta. La pauvre, désemparée, cheminait comme un zombi. Dans le grand hall d’entrée, d’un geste brusque elle arracha sa perruque pour la balancer au pied de la banque de réception. Les réceptionnistes, habituées à toutes les excentricités, ne se départirent pas de leur inoxydable sourire. La meuf devait être au bord de la crise de nerfs.
Sur le perron deux hommes vêtus de noir l’encadrèrent. Elle les suivit sans broncher jusqu’à un van noir dans lequel elle s’engouffra. Putain ça sentait le roussi il fallait que je lance les fusées de détresse. « Tarpon, je crois qu’ils enlèvent Ricotta… Ils vont me semer fastoche…»
« Note le numéro de la plaque, balance le à Marie et à moi et suis les tant que tu peux » Tarpon.
À ma grande surprise les molosses conduisirent leur van Mercédès à un train de sénateur. Je bichais, arrivé à la Porte Maillot, toujours tranquillos, ils remontèrent l’avenue Charles-de-Gaulle, axe majeur de l’ancienne patrie de Sarkozy. Je gardais mon cul bordé de nouilles sauf que, lorsqu’ils s’engagèrent dans les boyaux qui serpentent sous la Défense, je me pressentis la tuile : ils allaient s’enfiler la A14. Bonne pioche, les carottes étaient cuites : ma Vespa n’était pas de taille à lutter avec leur grosse cylindrée.
Au péage je me garai sur le parking « Tarpon, ils prennent la A14 suis larguée, désolée… »
La réponse tarda à venir mais, quand elle s’inscrivit sur mon écran, je n’en ai pas cru mes yeux : « T’inquiètes pas choupinette je sais où ils vont. Rentre au bureau, je t’y rejoins dès que j’en ai terminé avec mes nouveaux amis… »
J’en restai un long moment comme deux ronds de flan avant de faire demi-tour. Quand Tarpon m’avait embauché j’étais loin de me douter que j’allais me payer de telles doses d’adrénaline. « Faut te calmer ma grande, t’es pas dans un film, tu mets tes pompes dans la réalité, Ricotta vient de se faire enlever par des mecs qui ont des tronches de tueurs… »
La seule thérapie pour retrouver ma sérénité : tirer des longueurs à la piscine rue de Pontoise. « Merde ! Elle était fermée pour vidange… »
Arrivé à la Motte-Piquet je m’arrêtai à la terrasse d’une brasserie pour me jeter un demi derrière la cravate, la bière ça calme…
Je me plongeai dans le dernier Vargas Llosa, Aux Cinq Rues, Lima que j’avais acheté chez Gallimard.
«… Sa main droite restait posée sur la cuisse de Chabela et Marisa se rendit compte qu’elle s’était mise à transpirer.
Là-dessus, son amie bougea. Elle crut que son cœur s’arrêtait. Elle cessa quelques secondes de respirer et ferma les yeux avec force en feignant de dormir. Chabela, sans changer de place, avait levé le bras et voilà que Marisa sentait sur sa main posée en travers de la cuisse de son amie la main de Chabela. Allait-elle la retirer d’un coup ? Non, au contraire, avec douceur, tendresse aurait-on dit, Chabela, entrelaçant ses doigts aux siens, d’une légère pression tirait maintenant la main, toujours collée à sa peau, vers son entrejambe. Marisa ne parvenait pas y croire. Elle se sentait sous les doigts de sa main saisie par Chabela les poils d’un pubis légèrement renflé et l’orée humide, palpitante, contre laquelle elle la pressait. Tremblant à nouveau de la tête aux pieds, Marisa se tourna de côté, collant ses seins, son ventre, ses jambes contre le dos, les fesses et les jambes de son amie en même temps que de ses cinq doigts elle lui frottait la chatte, à la recherche de son petit clitoris, fouillant, écartant les lèvres mouillées de son sexe gonflé de désir, toujours guidée par la main de Chabela, qu’elle sentait trembler elle aussi, s’accouplant à son corps, l’aidant à se mêler et à fondre en elle. »
J’envoyai un SMS « Rosa ma belle arrive vite rue Charles Floquet, j’ai besoin d’amour… »
(16) « Je petit déjeune avec le direcab de Collomb demain matin. On fait le point ce soir chez toi avec l’équipe…»
- Rassurez-vous je ne piétine pas vos plates-bandes, votre type, dont j’ignore tout, je le filoche parce qu’il est en cheville avec une nana qui est dans le collimateur d’une de mes clientes et il vient de la rencontrer au George V, ça s’est mal passé. Suis réglo, ce que je vous propose c’est du gagnant-gagnant. Vous me dites ce que vous avez envie de me dire, ce qui vous arrange, et moi je mets tout ce que récolte sur la table.
Ils se marrèrent.
- Tu te crois dans un film de série B mec ?
- Pas vraiment, j’ai du répondant.
- Allonge !
- Pas si vite mes lascars, laissez-moi le temps de contacter ma donneuse d’ordres pour que je vous puisse vous donner toutes les garanties que je ne suis pas un guignol.
- Tu es du genre à pouvoir vendre père et mère mec pour conclure, avec nous ça ne prend pas. Retourne jouer dans ton bac à sable et lâches-nous les baskets !
- Ok je m’incline, qui vivra verra…
À ce moment précis mon smartphone bipa « Vous permettez ? »
C’était Marie « Je petit déjeune avec le direcab de Collomb demain matin. On fait point ce soir chez toi avec l’équipe…»
- Ça vous dit de lire ce SMS ?
- Montre !
Ils se repassèrent l’engin plusieurs fois, le doute s’instillait dans leur petite tête de bourres. Les politiques ça ne leur disait rien qui vaille, ils balisaient.
Le plus grand, avec un catogan et une barbichette ridicule, réagit le premier « Et si tout ça ce n’était qu’un coup monté pour nous rouler dans la farine ?
- Là mon gars je suis un extralucide car je te signale que c’est vous qui m’êtes tombés sur le râble en venant dans ce troquet pour m’impressionner. Tu tombes dans le roman-feuilleton à deux balles !
Son collègue le grassouillet aux cheveux gras ne put s’empêcher de m’approuver :
- Il n’a pas tout à fait tort Kevin !
Tempête sous un crâne, je venais de marquer un point décisif. Mon Smartphone bipa à nouveau, c’était Adelphine. « Vous permettez ? »
Je souris, je tenais une belle martingale.
- Un van Mercédès noir immatriculé ça vous dit quelque chose ?
Ils sursautèrent de concert avant de répondre un « Ouais ! » teinté d’acrimonie.
- Sans trop m’avancer, il semblerait que ce beau véhicule serve en ce moment à exfiltrer la dame du George V…
- La dame du George V !
Ils roulaient des yeux de merlans frits. J’enfonçai le clou « faut suivre les gars, c’est la gonzesse qu’a rencontré ce matin à la Galerie du George V votre filoché… »
Au lieu de pousser mon avantage je leur dis d’un air bonasse « vous voudrez bien m’excuser mais il faut que j’aille pisser, ma prostate ne supporte pas la bière… ». Fallait que je leur laisse le temps de se concerter.
Les chiottes de certains cafés parisiens sont des cloaques pestilentiels, celui-ci était digne de rentrer au Guinness des records. Le modèle à la turque constellé de merde. Je pris sur moi d’y stationner un long moment. Les graffiteurs habituels de ce genre de lieu y avaient déployés leur art avec un sens aigu de la glorification de leur bite.
À mon retour sur zone je compris que leur décision était prise. « Je remets ça ? »
- Ouais…
- 3 demis sans faux-col.
Le patron était au même niveau que ses chiottes, cracra de la tête aux pieds.
C’est le petit joufflu, Clovis, qui prit la parole « on veut bien marcher dans ta combine, tu n’as pas l’air complètement mariole. Pour conclure on se retrouve avec ta donneuse d’ordre à la brasserie Le saint Laurent au 10 rue des Saussaies. T’es raccord ? »
- C’est noté mais il va falloir que nous échangions nos 06…
- Pas de blême !
À nouveau mon smartphone grelota. « Vous permettez ? » Je voyais dans leurs yeux que vraiment je les faisais chier.
« Messieurs le van vient d’entrer sur la A14, auriez une petite idée de là où il se rend ? »
- Ouais !
(17) Tintin au Congo, totalement envapé, couinait « mort aux vaches ! »
Que du bonheur, je m’étais réinstallé dans mon appartement de la place Fürstenberg en compagnie de Lénine mon chat de gouttière et de Tintin au Congo mon mainate religieux qui jurait comme un charretier. Le quartier avait bien changé, en mal. Le Flore et les Deux Magots, des gargotes à touristes friqués, en mal du temps béni de Saint-Germain des Prés, y venaient boire du mauvais vin et mal bouffer. Mon Monoprix était toujours là mais je n’y connaissais plus personne. Pour ne pas déprimer après avoir cassé une petite graine, arrosée de vin nu, à Fish Boissonnerie rue de Seine je me suis payé une toile, suis allé au ciné quoi voir Le Caire confidentiel.
Le titre me rappelait l'un des meilleurs romans de James Ellroy, L.A. Confidential. À raison : comme l'écrivain américain dans son évocation du Los Angeles des années 1950 le cinéaste Tarik Saleh offre une intrigue criminelle captivante de bout en bout, avec tous les ingrédients du genre — femme fatale incluse. Mais aussi le portrait, social et politique, d'une mégalopole à un moment clé de son histoire, avec ses puissants qui se croient au-dessus des lois et ses misérables utilisés pour les basses œuvres... puis éliminés quand ils deviennent trop gênants.
Tout est pourri au royaume des pharaons dixit les Inrocks
L’inspecteur Noureddine mène l’enquête, qui le conduira dans toutes les strates de la société égyptienne, de ses bas-fonds torves à ses sommets luxueux, voyage urbain et social dont le terminus sera le constat désabusé et peu surprenant que tout est pourri au royaume des pharaons, à commencer par la tête de l’Etat.
Un film noir arabe prenant en charge un contexte politique récent et toujours d’actualité, ce serait déjà pas mal, mais là n’est peut-être pas le plus important. L’essentiel, c’est le talent et l’inspiration de Tarik Saleh pour transcender ce matériau réaliste, renouveler ses codes, en s’échappant dès qu’il le peut des clous de l’enquête de son flic pour se laisser porter par les vents d’une balade cinématographique sensualiste et sensorielle.
« Au début du film, Noureddine est un policier comme les autres, pas plus — mais pas moins — « ripou » que ses pairs. Il est même promis à un brillant avenir s'il continue de servir le système en fermant les yeux — et en se servant au passage. Mais Noureddine est de la trempe d'un Philip Marlowe, le privé désabusé des livres de Raymond Chandler (Le Grand Sommeil, Adieu, ma jolie) : il y a une vraie intégrité morale derrière son cynisme. Un coup de foudre amoureux, mais aussi le sort atroce réservé à une immigrée soudanaise vont réveiller sa soif de justice. Son supérieur faussement paternaliste a beau le promouvoir commissaire pour calmer ses ardeurs, rien n'y fait : Noureddine veut s'attaquer aux maîtres du pays, quitte à risquer sa vie. Le personnage est magnifique et son interprète, Fares Fares, grand échalas au visage taillé à la serpe, étonnant... »
En sortant j’envoyai un SMS à Tarpon pour lui dire que ce film le ferait bander.
Le soir donc, nous pataugions dans l’euphorie suite à la journée que nous avions baptisée « la George V » prononcé Vé. La réunion de débriefing, qui devait initialement se tenir rue Charles Floquet, fut déportée chez moi. Lénine bouda. Tintin en Congo fut encore plus ordurier que d’ordinaire ce qui ravit Adelphine et sa copine Rosa. Tarpon, le pur malt aidant, pontifia quelque peu en s’attribuant des lignées de médailles tel un général soviétique de la couvée du temps béni des Brejnev, Andropov et Tchernenko. En plus de Lulu le nouveau venu, qui se croyait dans une bande dessinée, nous décidâmes Tarpon et moi d’embaucher Rosa qui venait de quitter son job de contrôleuse de gestion chez Nicolas, le caviste du père Castel. Sa militance pour l’extension du vin nu ne pouvait tolérer d’être traître à la cause en additionnant les profits du baron de Lestac.
L’heure n’était plus à l’improvisation, Rosa tiendrait le planning des opérations et veillerait à l’intendance qui, comme chacun sait, fait la force des armées. Pour nourrir la troupe, des trofies au pesto de Genovese, de la ratatouille, préparée de mes mains, des fromages de Terroirs d’avenir de la rue Timbaud et des glaces de chez Geronimi. Pour le liquide que du Derain et du Bain.
Avant de faire bombance nous callâmes le scénario du lendemain : je me rendrais bien sûr seule à 10 heures chez le directeur de cabinet de Collomb, place Beauvau. Tarpon se positionnerait dès 10 h 30 à la brasserie Le saint Laurent au 10 rue des Saussaies pour réceptionner les deux lascars de la Mouzaïa. Je les y rejoindrais sitôt sorti de l’entrevue avec le direcab pour passer un deal avec eux. Adelphine se posterait sur son scooter place des Saussaies pour répondre à une éventuelle sollicitation.
Les adeptes du chichon, Tarpon, Adelphine et Rosa, discutaient le bout de gras sur les filières d’approvisionnement de résine, tout en tirant à qui mieux mieux sur leur joint. Tintin au Congo, totalement envapé, couinait « mort aux vaches ! ». Lénine condescendit à descendre du haut l’escabeau de la bibliothèque pour venir se nicher sur les genoux de Lulu qui, vin nu aidant, se voyait dans la peau d’un héros d’un jeu vidéo. Sa petite voix flutée passa au-dessus du brouhaha de nos conversations débridées.
- Vous croyez qu’ils l’ont violé la dame au Perfecto ?
(18) « il investit son argent sale dans l’économie souterraine au point de devenir le plus puissant chef mafieux du pays et il cherche aussi à blanchir ses revenus illégaux dans l’économie blanche
Lorsque je suis arrivé, mes deux motards de la Mouzaïa, bien moins flambards qu’hier, se tenaient serrés l’un contre l’autre, comme des poussins d’un jour, sur une banquette de skaï rouge de la brasserie Le saint Laurent au 10 rue des Saussaies. Je renouvelai leur ration d’expresso. Ils étaient dans leurs petits souliers les ramenards mais je ne profitai pas de mon avantage pour les enfoncer. Je les branchai sur l’arrivée de Neymar au PSG ce qui eut le don de les rasséréner.
Marie se fit attendre, normal, c’est une fille, sauf que pour l’occasion le coupable se nommait Collomb. « Il s’est pointé pour me saluer. Faut que vous sachiez que mon père d’adoption était très pote avec Raymond Barre qui a fini sa carrière comme maire de Lyon et a mis le pied à l’étrier au petit Collomb rien que pour faire chier le RPR de Chirac. Donc nous avons papoté de choses et d’autres, sans aborder notre sujet. Ça c’est du cambouis les mecs, à nous de nous en démerder. Dans ce genre d’affaire on n’est jamais couvert. Pigé !
Les bourrins opinèrent.
Le petit tout rond fit glisser une chemise cartonnée en notre direction : « C’est une note blanche qui fait le point sur l’origine de notre homme. Vous recevrez dans quelques jours une synthèse sur ce que nous savons de ses activités présentes et de sa dangerosité. Pour l’heure nous ne sommes en possession de rien qui puisse le coincer.
J’intervins :
- Vos collègues de la BRB pourquoi le filoche-t-ils ?
- On ne sait pas…
- Ça cloisonne toujours les mecs.
- Sans vouloir vous vanner, votre ami monsieur Collomb devrait être plus en mesure que nous de vous rencarder.
J’approuvai en soupirant.
Note blanche Le « commandant Arkan »
À 5 h 04 le 15 janvier 2000, à l’hôtel Intercontinental de Belgrade, trois hommes sont tués : Željko Ražnatovi¢, son ami Milenko Mandi¢ et son garde du corps, Dragan Gari¢ par Dobrosav Gavri¢, un ancien policier serbe qui blessé réussira à s’enfuir. Le « commandant Arkan », Željko Ražnatovi¢, défiguré, touché par trois fois à la tête baigne dans son sang. Une demi-heure après, transporté à l’hôpital, il respirait encore, avant de mourir.
Le « commandant Arkan » est né le 17 avril 1952 à Brežice en Slovénie, où son père, Veljko Ražnatović, un Monténégrin, qui servait comme officier dans l'aviation de l'armée populaire yougoslave (JNA), est stationné. Celui-ci gagna un haut rang grâce sa remarquable activité lors de la Seconde Guerre mondiale. Sa mère Slavka Josifović est serbe du Kosovo. Ballotté de ville en ville, au gré des affectations paternelles, il est élevé de façon sévère mais il se révèle très vite réfractaire à toute forme d’autorité.
Dès 16 ans, il écope d’une condamnation à un an de maison de correction pour une série de vols de sac à main. La suite est une litanie de braquages, de cambriolages, de condamnations, d’évasions, de fugues à l’étranger.
Après avoir purgé une peine de 3 ans, il s’expatrie et voyage en Europe, traquant les opposants politiques pour le compte de l’UBDA (police secrète yougoslave), poste qu’il doit à son protecteur Stane Dolanc, ami de son père et futur ministre de l’Intérieur du maréchal Tito. En échange de ses loyaux services, il bénéficie de protections, d’armes et de faux papiers, dont un passeport turc au nom d’Arkan.
Son casier judiciaire s’enrichit et il est alors classé par Interpol parmi les 10 criminels les plus recherchés et encourt 25 ans de prison pour l’ensemble de son œuvre. En mai 1985, Arkan choisit de rentrer au pays, à la tête d’un butin non négligeable et d’une sérieuse réputation de caïd.
La Yougoslavie se fissure, 10 ans à peine après la mort de Tito, le pays est au bord du gouffre. Des élections dans les différentes républiques démontrent que les peuples de l’ancienne fédération ne choisissent pas les mêmes voies politiques, et les tensions et violences nationalistes sont partout présentes. En dépit d’une relative popularité, le dernier Premier ministre de la république fédérale, Ante Markovi¢, échoue dans une ultime tentative de préserver l’unité du pays à travers une série de réformes économiques et sociales. Le président croate Franjo Tudjman et le Serbe Slobodan Miloševi¢ ne veulent pas lui laisser sa chance.
Arkan, jusqu’alors sorte de Jacques Mesrine narguant la police et l’institution carcérale, se transforme en un tueur sanguinaire. Il créé et commande à partir de 1991 une milice ultranationaliste appelée «les Tigres», dont de nombreux témoignages rapportent les exactions en Croatie - notamment en Slavonie orientale -, en Bosnie-Herzégovine puis au Kosovo.
Mais c'est en Bosnie-Herzégovine, contre les musulmans qu'il a promis de traquer partout, dans le moindre recoin du territoire yougoslave , que ses troupes, bien entraînées et équipées d'armements dernier cri, donnent la pleine mesure de leur terrifiant «talent». Dans les régions de Prijedor, Brcko, Zvornik, le long de la rivière Drina, elles appuient l'armée régulière selon une technique éprouvée: les fédéraux encerclent les villes, abandonnent aux paramilitaires les basses besognes de la purification ethnique et prennent ensuite le contrôle des localités vidées de leurs populations civiles non serbes.
Contrairement à d'autres croisés irréductibles du nationalisme, la signature des accords de Dayton et les concessions successives du président Milosevic ne l'écartent pas vraiment de l'entourage du pouvoir qu'il a toujours servi avec zèle. Le mercenaire a assuré ses arrières : il a déjà tâté de la politique en devenant, au début des années 90, député de... Pristina, où les Albanais, alors confinés dans une stricte situation d'apartheid, pouvaient l'apercevoir furtivement à son état-major du Grand Hôtel ou filant au volant de sa puissante Land Rover noire aux vitres teintées. Mais c'est sans grand succès qu'il tente de relancer sa carrière en fondant le Parti de l'Unité serbe, le plus extrémiste de tout l'échiquier politique.
Il se lance dans des affaires, financières et commerciales, pas toujours très nettes, achète des bureaux de change, devient propriétaire de restaurants. Et accède même à la présidence du modeste club de football de la capitale, Obilic, qu'il renforce grâce à son trésor de guerre et qu'il mène brièvement au sommet de la hiérarchie nationale aux côtés des deux géants, le Partizan et l'Etoile Rouge.
Parallèlement, fort de ses protections au sommet de l'appareil d'Etat, il pénètre les réseaux du milieu mafieux, qui ont pignon sur rue à Belgrade, et s'y fait autant d'ennemis qu'il y noue de juteux contacts. La rumeur affirme que sa garde rapprochée a déjà, plus d'une fois, déjoué de toute justesse des tentatives d'attentat. Il est vrai que, de même qu'on ne prête qu'aux riches, son statut de héros négatif absolu se gonfle volontiers de quelques mythes.
Le conflit qui embrase le Kosovo lui donne l'occasion de reprendre du service. Ses milices sont rapidement repérées aux points névralgiques de la province martyrisée, impliquées dans les opérations de déportations massives. Les Shiptares - appellation péjorative des Albanais -, on ne les consulte pas, on les commande, avait-il coutume de dire ; de toute façon, ils ont l'esprit limité, ils ne songent qu'à se reproduire comme des lapin.
Fanfaron, Arkan défie les soldats de l'Otan et leur promet, s'ils interviennent, un enfer pire que le Vietnam. Mais le «seigneur de la guerre», fatigué d'être en première ligne, demeure quelque peu en retrait. Désormais, il suit plus volontiers l'avance de ses hommes depuis ses bureaux de Belgrade qu'il ne les guide directement à l'assaut sur le terrain.
Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, qui l'a depuis longtemps placé sur sa liste secrète, se décide à rendre publique son inculpation pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Qu'il reçoit avec cet insupportable sourire ironique au coin des lèvres : « Qu'ils viennent me chercher s'ils l'osent. Qu'ils se rassurent: je les recevrai avec tous les honneurs qu'ils méritent.»
Cynique, arrogant, Arkan n'a jamais rien regretté de son passé, niant, au mépris des évidences, les faits les plus graves qui lui étaient reprochés. Il se vantait même plutôt de ses faits d'armes, encouragé par le culte malsain que continuaient à lui vouer les plus radicaux de la cause serbe. Un jour, après qu'il eut «nettoyé» sans état d'âme la ville bosniaque de Bijeljina, la passionaria Biljana Plavsic, alors toujours proche de Radovan Karadzic et encore loin de se rallier aux exigences de la communauté internationale, l'accueille avec emphase, en le qualifiant de pur héros serbe.
Fin calculateur, habile manipulateur, il plaçait aussi sa vie privée, avec complaisance, sous les projecteurs médiatiques. Lorsqu'il épouse en troisièmes noces la pulpeuse chanteuse Ceca, la « Madonna des Balkans » une vedette nationale de la scène turbo folk, la musique en vogue en Serbie, les journalistes se pressent à la cérémonie. Et il y apparaît à cheval, devant l'église orthodoxe, en uniforme d'apparat d'officier tchetnik - les combattants royalistes du général Mihajlovic lors de la Seconde Guerre mondiale.
En Bosnie, en Croatie, au Kosovo, ils sont des milliers à avoir espéré, sinon régler directement leurs comptes avec lui, au moins le voir en rendre à ses juges, dans le box des accusés du prétoire de La Haye. Mais, ultime rebondissement de l'histoire, c'est finalement dans son fief même de Belgrade, où il se croyait invincible, où il affichait avec morgue son sentiment d'impunité, que sa compagne de toujours, la violence, s'est brutalement retournée contre lui.
Zeljko Raznjiatovic abandonne à leur sort une femme et huit enfants. Le «Commandant Arkan» laisse derrière lui un nombre indéterminé de victimes.
Ranko Raznjiatovic dit Arkan Jr est l’un d’eux.