(16) « Je petit déjeune avec le direcab de Collomb demain matin. On fait le point ce soir chez toi avec l’équipe…»
- Rassurez-vous je ne piétine pas vos plates-bandes, votre type, dont j’ignore tout, je le filoche parce qu’il est en cheville avec une nana qui est dans le collimateur d’une de mes clientes et il vient de la rencontrer au George V, ça s’est mal passé. Suis réglo, ce que je vous propose c’est du gagnant-gagnant. Vous me dites ce que vous avez envie de me dire, ce qui vous arrange, et moi je mets tout ce que récolte sur la table.
Ils se marrèrent.
- Tu te crois dans un film de série B mec ?
- Pas vraiment, j’ai du répondant.
- Allonge !
- Pas si vite mes lascars, laissez-moi le temps de contacter ma donneuse d’ordres pour que je vous puisse vous donner toutes les garanties que je ne suis pas un guignol.
- Tu es du genre à pouvoir vendre père et mère mec pour conclure, avec nous ça ne prend pas. Retourne jouer dans ton bac à sable et lâches-nous les baskets !
- Ok je m’incline, qui vivra verra…
À ce moment précis mon smartphone bipa « Vous permettez ? »
C’était Marie « Je petit déjeune avec le direcab de Collomb demain matin. On fait point ce soir chez toi avec l’équipe…»
- Ça vous dit de lire ce SMS ?
- Montre !
Ils se repassèrent l’engin plusieurs fois, le doute s’instillait dans leur petite tête de bourres. Les politiques ça ne leur disait rien qui vaille, ils balisaient.
Le plus grand, avec un catogan et une barbichette ridicule, réagit le premier « Et si tout ça ce n’était qu’un coup monté pour nous rouler dans la farine ?
- Là mon gars je suis un extralucide car je te signale que c’est vous qui m’êtes tombés sur le râble en venant dans ce troquet pour m’impressionner. Tu tombes dans le roman-feuilleton à deux balles !
Son collègue le grassouillet aux cheveux gras ne put s’empêcher de m’approuver :
- Il n’a pas tout à fait tort Kevin !
Tempête sous un crâne, je venais de marquer un point décisif. Mon Smartphone bipa à nouveau, c’était Adelphine. « Vous permettez ? »
Je souris, je tenais une belle martingale.
- Un van Mercédès noir immatriculé 456 CB 45 ça vous dit quelque chose ?
Ils sursautèrent de concert avant de répondre un « Ouais ! » teinté d’acrimonie.
- Sans trop m’avancer, il semblerait que ce beau véhicule serve en ce moment à exfiltrer la dame du George V…
- La dame du George V !
Ils roulaient des yeux de merlans frits. J’enfonçai le clou « faut suivre les gars, c’est la gonzesse qu’a rencontré ce matin, à la Galerie du George V, votre filoché… »
Au lieu de pousser mon avantage je leur dis d’un air bonasse « vous voudrez bien m’excuser mais il faut que j’aille pisser, ma prostate ne supporte pas la bière… ». Fallait que je leur laisse le temps de se concerter.
Les chiottes de certains cafés parisiens sont des cloaques pestilentiels, celui-ci était digne de rentrer au Guinness des records. Le modèle à la turque constellé de merde. Je pris sur moi d’y stationner un long moment. Les graffiteurs habituels de ce genre de lieu y avaient déployés leur art avec un sens aigu de la glorification de leur bite.
À mon retour sur zone je compris que leur décision était prise. « Je remets ça ? »
- Ouais…
- 3 demis sans faux-col.
Le patron était au même niveau que ses chiottes, cra-cra de la tête aux pieds.
C’est le petit joufflu, Clovis, qui prit la parole « on veut bien marcher dans ta combine, tu n’as pas l’air complètement mariole. Pour conclure on se retrouve avec ta donneuse d’ordre à la brasserie Le saint Laurent au 10 rue des Saussaies. T’es raccord ? »
- C’est noté mais il va falloir que nous échangions nos 06…
- Pas de blême !
À nouveau mon smartphone grelota. « Vous permettez ? » Je voyais dans leurs yeux que vraiment je les faisais chier.
« Messieurs le van vient d’entrer sur la A 14, auriez une petite idée de là où il se rend ? »
- Ouais !
à suivre...