Pour lutter contre la disparition de la truffe, des chercheurs de l’Inra l’étudie depuis plus de quarante ans sous toutes les coutures : mycorhization contrôlée, génomique, physiologie, reproduction et écologie.
Truffes : les chercheurs ont du nez !
« Magiques ou aphrodisiaques, on a souvent prêté à la truffe de nombreux pouvoirs. Aujourd’hui, elle est surtout appréciée par les gourmets prêts à dépenser des fortunes pour se procurer ces diamants de la cuisine. Qu’elle soit du Périgord, du Tricastin, de Teruel (Espagne) ou encore du Piémont (Italie), la championne des champignons est rare et donc chère : la truffe noire du Périgord (Tuber melanosporum) coûte en moyenne 500 €/kg. La truffe blanche du Piémont (T. magnatum) peut avoisiner 6 000 €/kg. Son parfum varie en fonction du lieu où elle est cultivée, du terroir et de sa maturité.
Grâce entre autres aux efforts de l’Inra depuis plus de quarante ans, la baisse de production observée au cours du 20ème siècle est enrayée. Les apports de l’Inra sont significatifs autant d’un point de vue scientifique, avec plus de 70 papiers publiés dans des revues internationales dont deux dans la prestigieuse revue Nature, que d’un point de vue pratique avec la mise au point de l’inoculation des plants mycorhizés, qui associe en laboratoire l’arbre et la truffe, et l’amélioration des techniques culturales.
Depuis 25 ans, la production est stable avec même une tendance à l’augmentation ces dernières années. Toutefois, malgré la mise en place à grande échelle de plantations de plants truffiers (environ 1000 hectares par an), ainsi que l’amélioration des techniques de gestion des truffières, nous n’avons pas encore retrouvé le niveau de production de la fin du XIXe siècle.
La production française ne suffit plus à répondre à la demande, ce qui nécessite son importation accrue. Afin de pallier ce problème, six laboratoires et deux organisations professionnelles se sont regroupées autour du projet Systruf «Bases d’une intensification écologique durable des écosystèmes truffiers», financé par l’Agence Nationale de la Recherche.
Pendant quatre ans (2010-2013), ce programme de recherche participative entre la recherche agronomique et la filière trufficole a étudié la biologie et l’écologie de la truffe sous toutes les coutures : génomique, nutrition, développement, reproduction et interactions avec les plantes, les autres champignons et les bactéries du sol. Les chercheurs nous dévoilent ainsi une partie des mystères de la truffe. »
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Le 30 décembre 2010 j’écrivais :
« Enfant je détestais la galantine truffée du charcutier que maman achetait pour le repas de Noël et ce pour deux raisons : la première était gustative, je suis allergique à la gelée qui l’entourait, la seconde était liée à mon instruction religieuse, en effet ce carré noir central, tel l’œil de Caïn dans la tombe, ne me disait rien qui vaille. J’en mangeais bien sûr pour faire plaisir à ma sainte mère mais mon rapport à la truffe s’en est toujours ressenti : je ne cours pas après. Même que, dans mes vertes années, la Tuber mélanosporum, évoquait pour moi la ringardise de la poularde demi-deuil chère aux banquets républicains et aux demi-sel chers à Audiard et consorts. »
[…]
« Reste que la truffe garde encore aujourd’hui sa part de mystère, certes on n’élucubre plus en affirmant qu’elle naît « des pluies d’automne et des coups de tonnerre secs », on ne la diabolise plus, elle l’« enfant des dieux », depuis que notre sainte mère l’Eglise catholique et romaine ne la rejette plus comme porteuse de mille sorts, on laisse à l’Ecole Nationale de chimie de Toulouse et à la société Trufarôme leur aromatisant jus de truffe commercialisé sous la marque « Arôme de Truffe », on préfère penser à George Sand qui vouait à la « gemme des terres pauvres », la plus « révérée des princesses noires, une passion sans borne ou à Giono la dégustant « au plus près de la Provence, crue avec du sel et de l’huile d’olive ».
Moi ce que j’aime dans la truffe, la « rabasse » provençale, c’est qu’elle est capricieuse, exigeante : elle naît dans un sol attentif et adapté, c’est mademoiselle « juste ce qu’il faut » de chaleur, de froid, de pluie, c’est la locataire d’un arbre ami, c’est une amoureuse d’une nature humanisée mais respectée. De plus, sa récolte, le cavage s’avère délicate et aléatoire. Elle nécessite un détecteur : cochon (S-O), chien (S-E), mouche (Grasse) selon la tradition locale, de la patience, du nez, de la délicatesse lorsque le caveur gratte le sol avec son « truffidou ». Connaissance empirique des signes annonciateurs, sens de l’observation : le brûlé du sol autour de l’arbre truffier, ressenti, chaque rabassier a ses secrets. »
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Si je vous demande :
- Est-ce que vous connaissez le tuber magnatum pico ?
Bien peu vont me répondre, mais si au contraire, je vous dis :
- Est-ce que vous aimez la truffe blanche ?
J’ai plus de chance d‘obtenir des réponses positives. Et pourtant, il s'agit du même produit, l'un des plus précieux au monde du point de vue gastronomique et économique. À cause de son prix très élevé, la valeur de la truffe blanche peut dépasser celle d'un diamant.
La truffe blanche d'Alba est la plus célèbre. Alba est une commune du Piémont, en province de Cuneo, qui détient le record de la plus ancienne Foire de la Truffe blanche (entre les mois d'octobre et novembre).
La Vente aux enchères Mondiale de la Truffe Blanche d'Alba qui a lieu dans la Salle des Masques au Château de Grinzane est très people de Joe di Maggio à Alfred Hitchcock, mais aussi Ugo Tognazzi, Alain Delon, Gérard Depardieu et beaucoup d'autres.
À l'occasion de l'édition 2010, 13 truffes ont été vendues aux enchères pour un total de 307,2 mille euros. L'une des truffes plus précieuses a été vendue à Hong Kong à 105 mille euros, l'autre à Grinzane à 100 mille euros.
En 2009, Hong Kong s'est adjugée la truffe la plus précieuse ayant un poids de 750 grammes, vendue à 100.000 euros.
AFP | Publié le 22/10/2016
« Au total, l’Italie compte 200 000 truffiers, tout type de champignon confondu, dont 4000 dans le Piémont, où se trouve Alba. Depuis 86 ans, cette ville de 30 000 habitants accueille chaque année pendant presque deux mois une «grande foire à la truffe blanche», qui attire des milliers de visiteurs, y compris étrangers.
Cette année (2016), le prix de la truffe blanche d’Alba oscille entre 3 et 4000 euros le kilo à la Fiera, qui dure jusqu’au 27 novembre.
«Cela fait 50 ans que je cherche des truffes, je connais tous les plants, tous les sentiers», dit le truffier qui préserve jalousement ses «lieux secrets». «A une époque il y avait beaucoup plus» de truffes, mais certains plants ont été coupés et d’autres, avec la pollution, ne produisent plus.
Face à ce constat, une campagne de financement participatif à hauteur de 50 000 euros a été lancée pour sauvegarder l’écosystème singulier des terrains truffiers de la région.
Autrefois bien entretenus, les bois sont désormais «plus dans une situation d’abandon», explique le président du Centre national d’étude des truffes, Antonio Degiacomi. «Il y a beaucoup de plantes grimpantes, qui entrent en compétition» avec les plants truffiers.
«Il n’y a pas de menace imminente mais (...) il faut être pro-actif», insiste-t-il en soulignant l’importance de «nettoyer les terrains, de planter de nouveaux plants», même si le fait que les chasseurs de truffes ne sont souvent pas les propriétaires des terrains complique les choses.
«Sa particularité est la légèreté incomparable de ses arômes et son élégance», souligne Matteo Baronetto, chef du restaurant «Del cambio» à Turin.
«La truffe est comme le vin, chaque zone a son parfum» et celle d’Alba est «la plus parfumée», assure Giovanni Sacchetto.