Dans ma vieille Vendée y’avait le culte de « la vraie croix », même que dans une bulle de verre d’un ostensoir y’en avait un petit bout et le curé la faisait embrasser aux fidèles (j’aimais bien car entre chaque baiser le curé essuyait la bulle avec un linge immaculé). Maintenant y’a à Paris « la vraie gauche » encensée par des pétitionnaires, des faiseurs de tribunes dans Libération, derniers défenseurs de la pureté des origines du socialisme déposé dans une urne rue de Solférino. Ils vilipendent les renégats, les traîtres, les social-traîtres, la gauche de droite qui quitte l’Hamon.
Pour mémoire rappelons aux petites louves et petits loups, qui ne voient pas plus loin que leurs pages Face de Bouc, qu’il y eut aux origines le Congrès de Tours qui vit l’érection du Parti Communiste et la création de la SFIO. Deux partis qui, après un Front Populaire, s’aimaient d’amour tendre et s’échangeaient de doux noms d’oiseaux. Sous la République, IVe du nom, les socialistes d’un Guy Mollet prenant le pas sur PMF s’illustrèrent par leurs reniements en Algérie avec la complicité de Mitterrand. Les gars du PC, de Thorez à Waldeck-Rochet, bien pacsés avec Moscou, prospéraient dans les ceintures rouges, les bastions ouvriers, seuls représentants de la « vraie gauche ».
L’irruption dans le paysage du grand Charles bouleversa la donne avec sa Ve République. Feu les vieux partis de la IVe vilipendée, radicaux, MRP, socialos hachés menus, restait plus que le PCF. Mais à gauche des vibrions contestaient la vieille maison du Boulevard Malesherbes, la SFIO, ce fut le PSA et le PSU détenteurs des ferments d’une nouvelle « varie gauche ». Pendant ce temps-là, avec une poignée de fidèles, le Mitterrand se refaisait la cerise en se présentant comme candidat unique de la Gauche en 1965.
Lorsque celui-ci fit main basse sur le PS à Epinay, le vrai homme de gauche François Mitterrand, assemblant dans un même sac les néo-cocos du CERES et la tentation centriste de Mr X Gaston Deferre, pour balayer «un vrai homme de gauche» Alain Savary.
Et puis avec les Assises de Grenoble naquit la 2e gauche, dites américaine, avec Rocardestaingt, dixit Le Che par la suite monté au ciel pour en redescendre, dézinguée par le jeune homme de gauche, Laurent Fabius, au congrès de Metz, « entre le Plan et le marché, il y a le socialisme », roulée dans la farine en 1981 et 1988, virée de Matignon, exécutée par Tapie aux Européennes avec la complicité de Mitterrand, réduite à la sainte image d’un Rocard éternel perdant fidèle à son parti.
Le Florentin, adepte de l’ambiguïté, était parvenu à ses fins en réduisant les gars du PCF au rôle de porte-serviettes avant qu’ils ne fussent emportés par le flot des pierres du Mur de Berlin. Après lui le déluge, le PS sous la main molle de Hollande, de synthèse en pseudo-synthèse prospérait dans l’opposition et les régions de France. Parti de féodaux et d’attachés parlementaires, l’embellie de Jospin et de sa Gauche Plurielle qui explosa lors du coup de tonnerre de la Présidentielle de 2002. Ce fut le début de la fin en dépit des avatars du couple Royal-Hollande, unis, puis séparés, puis réunis. Elle battue, lui élu avec une majorité concoctée par la mère Aubry avec Duflot.
Mélenchon tribun parut avec la joute présidentielle, ressuscitant « la vraie gauche » avec un PC subclaquant ne subsistant dans ses derniers bastions que grâce à la complicité du PS.
Et puis, cahin-caha, une fois que le trio Valls-Montebourg-Hamon eurent fait éjecter Ayrault de Matignon, apparurent les frondeurs du PS, emmené par un certain Christian Paul, récipiendaire de la circonscription du père François, bientôt rejoint par Montebourg et Hamon les promoteurs de Valls.
C’est à ce point que nous pouvons jauger qui incarne la « vraie gauche » :
- Hamon a mis à bas lors de la belle alliance populaire Valls et Montebourg… avant de se pacser avec Jadot qui a vendu les Verts pour une poignée de circonscriptions.
- Mélenchon, après avoir mis au pas ce qu’il reste de féodaux du PC, et refusé les primaires, a snobé le petit Hamon.
Qui ?
Ni l’un ni l’autre, nous en sommes revenus au bon vieux temps de la Gauche en miettes d’avant Epinay, d’un côté une gauche un peu verdie qui se la joue la dure pour mieux s’amollir au contact du pouvoir, de l’autre une gauche dure qui reprend le flambeau protestataire du PCF mais sans les électeurs populaires qui ont migré vers le FN.
Il n’y a plus en magasin de Mitterrand pour rabibocher ces gauches irréconciliables, les temps ont changé, la césure est entre la mondialisation heureuse et le repli sur soi, resurgit avec Macron la vieille tentation d’un Centre aux manettes, dernier rempart contre l’extrême-droite et la droite extrême.
Mais n’enterrons pas encore Fillon, il bouge encore, son socle est en dur et c’est un rebelle qui aime les beaux costars :
Qui a payé les costumes de François Fillon?
François Fillon est-il en train de surfer sur ce populisme chrétien que Patrick Buisson avait tenté de vendre à Nicolas Sarkozy ?
Pourquoi François Fillon peut encore gagner
Par Etienne Dujardin
Au secours, avec cette caricature de Macron, la vieille propagande est de retour!