Les critiques ordinaires, ceux de cinéma ou littéraire, puisent dans le stock de films à l’affiche ou des livres parus pour chroniquer. Même si certains sont sensibles aux sirènes des chargés de communication, leur choix est libre, nul ne fait un tri préalable pour eux.
Dans le monde du vin, tel n’est pas le cas pour certains besogneux de la critique qui se voient offrir sur un plateau, parfois tous frais payés par les interprofessions, des vins proposés par ces pompeuses de CVO. De même beaucoup de vins dit sélectionnés et commentés par ces « critiques » l’ont été par des boîtes de com déjeuner de presse inclus.
Certains se vantent du nombre de flacons dégustés pour asseoir leur réputation alors qu’ils ne pratiquent que de la dégustation d’abattage où très souvent les nouveaux talents sont absents.
Bref, tout ce petit monde, ouvrier de la 25e heure m’emmerde par sa suffisance et son arrogance. Comme je n’ai nulle envie de me faire des trous dans l’estomac pour si peu je préfère me moquer d’eux, ce qui est péché en ce temps de carême, en déclarant ma flamme à l’Alsace.
Et pourtant, à l’origine, ce n’était pas gagné, le 13 mars 2010 j’écrivais :
« Lorsque mon ami d’enfance Dominique Remaud rejoignit Strasbourg pour y terminer ses études de pharmacie nous étions persuadés à la Mothe-Achard qu’il quittait la douceur océanique, certes un peu pluvieuse, pour les froidures d’un rigoureux et austère climat continental. Il nous décrivit Strasbourg comme une ville universitaire accueillante et chaleureuse ça nous rassura.
Bien avant cet épisode, en dehors de mes connaissances d’Histoire et de Géographie sur l’Alsace – des matières dont je raffolais – mes images de cette province frontalière écartelée se résumaient dans deux de ses symboles, qu’un char de notre quartier, lors de la fête des fleurs, avait reconstitués : la cigogne et la grande coiffe alsacienne avec ses deux ailes de papillon noir (le tout fait avec des fleurs de papier crépon).
Du côté des vins, hormis des noms de cépages dont certains se révélaient pour nous imprononçables, en ce temps-là je les rangeais dans une étrange trilogie : les Monbazillac, les Layon, et bien sûr les Alsace. Les puristes vont me fusiller mais que voulez-vous l’ignare, que j’étais et que je reste, ne retenait que la sucrosité. Ma relation au sucre est depuis toujours proche de l’ascétisme, de la dose infinitésimale, je n’aime guère les bonbons, les desserts sucrés et je bois mon café nature. Le sucre masque, alourdit, empâte. Donc, hormis le nez des Alsace qui me plaisait je préférais tremper mes lèvres et égailler mes papilles dans d’autres nectars.
Ensuite je suis monté à Paris et là, surprise, les vins d’Alsace n’étaient guère présents sur les cartes des restaurants. Je passe sur les détails de ma vie mais je dois confesser que si sur cet espace de liberté je n’ai jamais chroniqué sur les vins d’Alsace c’est sans doute de ma part une forme de retenue, de pudeur car j’ai du mal à pénétrer dans l’univers des vignerons alsaciens. En effet, dans mon parcours je n’ai jamais arpenté le terroir alsacien – tant mieux pour lui d’ailleurs car mes chefs m’envoyaient plutôt en terre de mission – et si j’ai tout au long de ma vie personnelle pu apprécier des Grands Vins d’Alsace mon côté semelles de crêpe dans les chais et les vignes, mon goût pour le contact des hommes, n’ont jamais été assouvi. Bien sûr il ne tient qu’à moi d’aller m’immerger un de ces quatre du côté de Ribeauvillé chez Etienne Sipp ou de Bergheim chez Jean-Michel Deiss ou chez quiconque voudra bien me recevoir. Les longs nez et les gorges profondes doivent en lisant ces lignes faire déjà des gorges chaudes « au lieu de nous enfariner de tes angoisses t’as qu’à déguster mon petit c’est le B.A.BA des écrivains du vin... » Ben non, chers éminents collègues, je ne suis qu’un chroniqueur pas un dégustateur, moi j’ai besoin de sentir, de ressentir avant de m’aventurer sur un terrain qui n’est pas le mien.
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Le 23 mai 2012, au Pavillon Gabriel, je découvrais Jean-Louis Mann, vigneron avenant et passionné, qui me fit déguster son Sylvaner 2010 Vieilles Vignes AOC Alsace.
Superbe, droit, d’une fraîcheur sans pareille, un blanc comme je les aime, vif mais sans angle aigu, charnel au sens le plus tendre : l’envie de caresser plutôt que de prendre, apprécier, se laisser aller sans précipitation. Scotché le Taulier, d’autant plus accroché que ce vigneron respire la même rectitude que son vin. Nous avons beaucoup échangé, y compris dans un lieu où le Général de Gaulle délivra à Pompidou, à l’entracte d'une pièce de théâtre, un de ses traits dont les militaires ont le secret.
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Le 4 octobre 2014 je relatais la découverte de Jean-Pierre Rietsch à Besançon, en compagnie de son épouse, lors du lancement de la bible naturiste « Tronches de vin », des gens délicieux, discrets et avenants. Alsaciens, leur domaine de Mittelbergheim fut créé à la fin des années 1970 par Pierre et Doris Rietsch ; il est aujourd’hui dirigé par leurs enfants qui le conduisent désormais avec une approche nature.
Depuis je suis conquis, 100% Ritch pour vous épargner « le My tailor is Rietsch® » déjà déposé par une célèbre blogueuse estampillée RVF qui m’enverrait sinon du papier bleu par huissier.
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Et puis au gré de mes découvertes personnelles, sans le filtre qui limite le choix de mes chers confères j’ai découvert :
Christian Binner ICI
Frederic Geschickt ICI
Philippe Brand ICI
Christophe Lindenlaub ICI
Oui I love Alsace, et dernière remarque vacharde pour ceux qui vouent les vins dit nature à finir dans l’évier, les vins cités ici ne le sont pas tous loin de là, faites donc honnêtement votre métier, allez donc sur vos deniers à la rencontre de cette nouvelle génération de vignerons alsaciens au lieu de nous bassiner avec les seuls vins qu’on vous met sous le nez.