L'élection présidentielle 2017 aura lieu les 23 avril et 7 mai 2017, nous sommes donc entrés dans les 100 jours.
Je vais tenter, au cours de cette période, de tenir une chronique dominicale où je mettrai mon grain de sel sur des sujets qui me passeront sous le nez.
C’est à dessein que j’ai évoqué les 100 jours. Je puise ma source dans une chronique de 2015 de Guillaume Perrault du Figaro.
Le 1er mars 1815, Napoléon, qui s'est enfui de l'île d'Elbe quelques jours plus tôt, débarque à Golfe-Juan. Le 20 mars, il entre aux Tuileries, que Louis XVIII a quittés la veille pour l'exil. L'Empereur a reconquis son trône sans tirer un coup de fusil. Les Cent-Jours s'achèvent à Waterloo (18 juin), qui entraîne la deuxième abdication de Napoléon et son exil à Sainte-Hélène.
De cet épisode romanesque et désastreux, la France subit encore les conséquences, comme le sous-sol conserve la trace d'événements géologiques lointains.
Le premier legs des Cent-Jours est qu'il est recommandé aux Français de regarder le dévouement et la fidélité avec méfiance.
On ne compte plus les personnalités qui, après avoir juré fidélité à Louis XVIII, ont retourné leur veste et se sont ralliées à Napoléon à mesure de son avancée vers la capitale.
Le 7 mars, le maréchal Ney déclare au roi: «Je promets à Votre Majesté de ramener le monstre à Paris dans une cage de fer.» Le 14 mars, le même adresse aux soldats qu'il commande un ordre du jour célèbre: «La cause des Bourbons est à jamais perdue!»
Le penseur libéral Benjamin Constant compare Napoléon à Attila. Dans le Journal des Débats, il conclut ainsi son article: «Je n'irai pas, misérable transfuge, me traîner d'un pouvoir à l'autre, couvrir l'infamie par le sophisme et balbutier des mots profanés pour racheter une vie honteuse.» Trois semaines plus tard, le même Benjamin Constant, appelé par Napoléon de retour aux Tuileries, accepte de rédiger un projet de Constitution et est promu conseiller d'État.
Au lendemain des Cent-Jours, un habile journaliste a publié un Dictionnaire des girouettes qui recensait tous les retournements de veste dont les contemporains avaient été témoins. «Cette époque, où la franchise manque à tous, serre le cœur, écrit Chateaubriand dans ses Mémoires d'outre-tombe. Chacun jetait en avant une profession de foi, comme une passerelle pour traverser la difficulté du jour ; quitte à changer de direction la difficulté franchie (…) A cette impossibilité de vérité dans les sentiments, à ce désaccord entre les paroles et les actions, on se sent saisi de dégoût pour l'espèce humaine.»
Les ralliements à Macron s’accélèrent et certains sont bien gênants pour lui : Alain Minc qui soutenait Juppé à la primaire de la droite après avoir été un sarkozyste dévoué ; Bernard Kouchner… 1/3 mondiste, 2/3 mondain, intermittent du spectacle politique.
Le délégué général d’en Marche!, Richard Ferrand ne s’est ainsi pas vraiment montré très satisfait par cette nouvelle.
« Ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent, disait Edgar Faure. Transmis à Alain Minc qui a naguère prédit et voulu notre échec. »
Selon Bernard Kouchner, Emmanuel Macron est «un homme qui ouvre le jeu, qui ne dit pas du mal des gens par goût électoral. Il pose des questions et il est sensible, c'est déjà pas mal. C'est l'homme qui ne s'arrête pas au clivage droite-gauche, et il reste humaniste». «C'est une belle aventure. Et j'aime l'aventure et la solidarité!»
Mais qui se soucie de l’avis de Kouchner ?
Du côté de Solférino les girouettes sont prêtes à entrer en action dès dimanche soir, le retournement de veste va être à l’ordre du jour dans les semaines qui viennent, faut les comprendre : après la Présidentielle viendront les Législatives, il leur faut choisir le bon wagon pour espérer sauver leurs circonscriptions.
« Une tribune en soutien à Macron. Selon les informations d’Europe 1, un texte circule en effet en ce moment de main en main entre les députés socialistes proches de Manuel Valls. Ses auteurs : Christophe Caresche, Gilles Savary ou encore François Loncle, des élus tous aujourd’hui ardents soutiens de l’ancien Premier ministre. Et leur texte n’est autre qu’un appel à soutenir… Emmanuel Macron en cas de victoire de Benoît Hamon dimanche. Cette lettre pourrait être publiée en tout début de semaine prochaine. »
Mais le haut fait de la semaine c’est le Pénélopegate déclenché par le Palmipède paraissant le mercredi. La sainte épouse, officiellement femme au foyer, de l’incorruptible Fillon fut pendant de longues années sa salariée à l’AN, et celle de son suppléant lorsqu’il fut Ministre, et pour mettre un peu plus de beurre dans les épinards du couple de Sablé elle émargea, entre mai 2012 et décembre 2013, à la Revue des 2 Mondes alors propriété de son ami Marc Ladreit de Lacharrière, dont elle aurait reçu, au total 100 000 euros bruts.
La réponse de celui-ci vaut son pesant de « circulez, y’a rien à voir, je fais ce que je veux de mon pognon ! »
« C’est une femme intelligente, elle a lu beaucoup de livres – dont deux résumés seulement ont été publiés. » C’est ainsi que l’homme d’affaires Marc Ladreit de Lacharrière justifie d’avoir salarié pendant près de deux ans Penelope Fillon, épouse de l’ex-premier ministre, dans la Revue des deux mondes dont il est propriétaire, pour seulement deux notes de lecture.
La revue a seulement publié deux courtes recensions de livres écrits par Mme Fillon sous le pseudonyme de Pauline Camille, à l’automne 2012, sans que le directeur de l’époque, Michel Crépu, ne les ait jamais sollicitées. « Un après-midi, Marc Ladreit de Lacharrière m’a appelé et m’a dit : « Penelope Fillon s’ennuie. Pourrait-elle critiquer quelques livres ? », raconte M. Crépu. Je ne l’ai jamais vue, ne lui ai jamais parlé. Les deux notes ne sont pas passées par moi. »
Marc Ladreit de Lacharrière se justifie : « La revue voyait son chiffre d’affaires baisser chaque année. J’ai donc demandé à quelques amis et personnalités de réfléchir à son devenir, notamment en l’ouvrant vers l’étranger. » « Penelope Fillon était de ceux-là », ajoute-t-il sans donner d’autres noms. Selon l’homme d’affaires, cette « réflexion stratégique informelle » à laquelle M. Crépu, parti fin 2014, n’a pas été associé, n’a pas donné lieu à des réunions. « J’ai dans mes activités une agence de notation, avec des sièges à New York, Londres et Hongkong, je suis un homme du téléphone et de face-à-face », argumente le patron de Fimalac.
Mon expérience personnelle des pratiques des parlementaires de tous bords puise sa source dans les 3 années passées, 1981-83, à l’Hôtel de Lassay au cabinet du Président de l’époque. Je dois avouer que, n’ayant jamais mis les pieds dans le marigot politique, je fus estomaqué. Tout était alors possible, le budget de l’AN était secret, la Cour des Comptes n’y mettait jamais son nez, les marchés publics étaient attribués sans appel d’offres, les primes en liquide circulaient sans que cela gêna quiconque.
On peut railler la gauche mais tout ça a été balayé en cette période. Mais, l’entre soi cher à nos élus n’en a pas pour autant cessé : l’embauche de la parentèle sur l’enveloppe du député fait partie d’un deal entériné par la Conférence des Présidents.
En conséquence, Pénélope Fillon avait parfaitement le droit d’être l’assistante de son mari. L’effectivité de ses prestations est une autre paire de manches, sans nul doute elle a collaboré et utiliser la qualification « d’emploi fictif » c’est aller bien vite en besogne.
Pour ma part, la seule question qui se pose est simple : quel est le rapport entre la prestation et la rémunération ?
Et c’est là où le bât blesse, les sommes en jeu sont totalement disproportionnées avec ce qui avancé comme prestation par l’intéressé ou ses porte-paroles.
Lire Je suis assistante parlementaire depuis dix ans, et je suis sidérée par le Penelope Gate
Pierre Laurent : Ça devrait être le bon sens que, quand on est parlementaire, on n’embauche pas quelqu’un de sa famille comme assistant parlementaire.
- Guy Birenbaum : Ça existe chez vous ?
- Pierre Laurent : Non, ça n’existe pas.
- Guy Birenbaum : Si si, ça existe. Monsieur Carvalho, sa femme, sa conjointe, attachée parlementaire à la permanence et en partie à l’Assemblée nationale. J’étais à l’instant sur le site de la Haute autorité pour la transparence.
- Pierre Laurent : Eh bien moi je ne suis pas favorable à cela.
S’en émouvoir est sain, aussi bien de la part de ceux qui triment pour 2 balles dans des conditions souvent dures, que des cadres supérieurs qui touchent les mêmes émoluments pour un travail hautement qualifié.
Le pire dans cette affaire c’est que ce pauvre Fillon pense que lui et madame sont de bonne foi et que cette affaire relève des boules puantes balancées par ses adversaires pour nuire à son image d’incorruptible.
Au fait : qui donc a balancé ces infos au Canard ?
Sûrement une amie qui lui voulait du bien… une gorge profonde qui s’était promis de le dézinguer.
Que François Fillon médite sur la saillie élégante de Jacques Chirac « les emmerdes, ça vole toujours en escadrille ».
Enfin, sur le thème « j’en ai vu des vertes et des pas mûres » sous les ors du pouvoir, l’un des problèmes majeurs des hommes politiques siégeant à Paris c’est la gestion de leur épouse légitime restée dans leur belle province.
Ce qui me reste de la charité chrétienne chère à François Fillon m’empêche d’aller plus avant dans les alcôves ou les emplois de complaisance…
À dimanche prochain sur mes lignes…