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22 janvier 2017 7 22 /01 /janvier /2017 08:00
CHAP.17 extrait sec, « NKM a toujours trahi ses électeurs, à Longjumeau, elle n’a pas fait long feu, pour être députée de l’Essonne elle a viré Wiltzer» Rachida Dati

Brexit dur, Trump aux commandes, et le n°1 chinois Xi Jinping, qui fêtera bientôt ses cinq ans à la tête de la Chine, a tenu une tribune doublement historique sur la scène du Forum économique mondial (WEF) de Davos. Aucun président chinois avant lui n’avait jamais fait le déplacement pour ce sommet annuel des élites économiques mondiales dans les montagnes suisses; et, surtout, Xi Jinping a délivré un étonnant plaidoyer en faveur du libre-échange.

 

Le chef du dernier empire communiste de la planète s’est posé en champion d’un monde ouvert et connecté, comparant l’économie mondiale à «un vaste océan dont il est impossible de s’échapper». «Toute tentative de stopper les échanges de capitaux, les technologies et les produits entre pays […] est impossible et à rebours de l’histoire», a lancé le secrétaire général du Parti communiste chinois (PCC), provoquant la première salve d’applaudissements à travers la salle.

 

«Certains blâment la mondialisation économique comme étant responsable du chaos du monde», a affirmé Xi dans un message destiné à celui qui l’accuse de manipuler sa monnaie, le yuan, pour soutenir les exportations chinoises et de tuer les emplois sur le sol américain, «mais ce n’est tout simplement pas le cas». «Nous devons rester attachés au développement du libre-échange et des investissements, et dire non au protectionnisme. Promouvoir le protectionnisme, c’est comme s’enfermer dans une pièce noire. Personne n’émergera en vainqueur d’une guerre commerciale»

 

Retour en arrière, 50 ans en Chine, «Feu sur le quartier général», « La révolution n’est pas un crime, la rébellion est justifiée»...

 

La «Grande Révolution culturelle prolétarienne» fut officiellement lancée par une lettre du Parti communiste en date du 16 mai 1966, en fait déclenchée par Mao Tsé-toung pour consolider son pouvoir après de grosses difficultés politiques et économiques, liées à l'échec de la politique dite du «Grand Bond en avant».

 

«Nous devons abattre les responsables du Parti engagés dans la voie capitaliste. Nous devons abattre les sommités académiques réactionnaires de la bourgeoisie et tous les “monarchistes” bourgeois. Nous devons nous opposer à tous les actes de répression contre la révolution. Nous devons liquider tous les génies malfaisants. Nous devons extirper énergiquement la pensée, la culture, les mœurs et coutumes anciennes de toutes les classes exploiteuses. Nous devons réformer toutes les parties de la superstructure qui ne correspondent pas à la base économique du socialisme. Nous devons purger la Terre de toute la vermine et balayer tous les obstacles!»

 

Et pendant ce temps-là dans notre vieux pays fourbu, hormis les débats poussifs de la primaire de la gauche et la macronite aigüe, c’est l’investiture de NKM dans la circonscription parisienne en or pour la droite, celle de François Fillon, qui fait le miel des médias. En effet, elle permet de ressortir de l’oubli Rachida Dati. Comme à son habitude celle-ci n’y ai pas allé de main morte. Après avoir déjà poussé un bon gros coup de gueule dans Le Parisien, jeudi, l’eurodéputée-maire du VIIe poursuit sa charge vendredi 20 janvier sur France info et ça balance pas mal à Paris, beaucoup même.

 

« Au départ, je n’étais pas candidate à l’investiture, assure l’ancien ministre de la Justice de Nicolas Sarkozy, pour justifier qu’elle n’en fait pas une affaire personnelle. On peut en douter. Elle enchaîne :

 

« Normalement, il y a consultation des élus locaux. Quand il y a un désaccord, il y a un vote. Sur cette circonscription, tous les élus n’ont pas été consultés. François Fillon ne les a pas reçus. Normalement c’est une commission d’investiture indépendante qui décide. Ce n’est pas à François Fillon de désigner un successeur. Je ne crois pas, sauf si on est dans une monarchie, qu’on se transmet des pouvoirs et des charges de droit divin. Aucune consultation des élus locaux ! »

 

Mais Rachida Dati ne s’arrête pas en si bon chemin, elle défouraille. Elle estime qu’il y a, de la part des médias et des politiques, un délit de sale gueule à son encontre dans les bisbilles qui l’opposent à celle qui fut candidate à la primaire de la droite :

 

« Deuxième chose : vous avez quelqu’un, il faut quand même le reconnaître…. Alors, c’est vrai, elle a la bonne image, c’est sûr qu’elle a une meilleure gueule que la mienne. Pardon de l’expression. Elle a fait polytechnique, elle a jamais bossé de sa vie. Moi je trime depuis que j’ai 16 ans et demi. Je sais ce que c’est que de signer un contrat de travail, de négocier un bail, d’obtenir un emprunt, les fins de mois difficiles, d’avoir une charge de famille… »

 

Vous croyez avoir tout lu ? Que Rachida Dati a exprimé toute sa rancœur face à une investiture qui « la peine pour ses administrés » ? Ce n’est pas fini. Sa dernière saillie du jour se concentre encore plus précisément sur Nathalie Kosciusko-Morizet qui, assure-t-elle, « trahira » François Fillon « comme elle a trahi tous les autres » en visant déjà la présidentielle de 2022 :

 

« Madame Kosciusko-Morizet a toujours trahi ses électeurs. Elle a voulu être maire de Longjumeau, elle a pas fait long feu. Elle a voulu être députée de l’Essonne. Puis "je veux que Paris", "je veux reconquérir Paris, je suis courageuse, je vais dans le 14e". Et aujourd’hui, elle dit "tiens, je vais m’écraser là où ça va emmerder tout le monde". La politique, ce n’est pas de la vengeance. Ça me fait de la peine pour mes administrés. Je vais vous dire, elle a déjà négocié son poste de ministre, elle ne sera jamais là, jamais présente. Je préviens les électeurs. A peine élue, elle sera déjà sur le futur combat de la présidentielle de 2022 parce qu’elle trahira François Fillon comme elle a trahi tous les autres. »

 

Comme j’ai l’esprit d’escalier, je dévale de mes propos sur le slogan de Mao « Feu sur le quartier général » pour me retrouver face au désastre annoncé de la maison socialiste. Joffrin dans Libé s’interroge :

 

Faut-il tuer le Parti socialiste ?

 

Bien avant de choisir lequel des candidats aura leur préférence - Valls et sa social-démocratie réaliste, Montebourg et son socialisme «made in France», Hamon et son alter-socialisme, ou encore Peillon et son républicanisme de bon aloi -, c’est la question politique cruciale que doivent se poser les électeurs de gauche et du centre gauche. Qu’ils restent chez eux, qu’ils traînent les pieds, qu’ils décident de sanctionner tous ceux qui ont eu à voir avec le quinquennat, ou au contraire qu’ils désignent déjà Emmanuel Macron, l’une des têtes pensantes du hollandisme quoi qu’il en dise, le résultat sera le même : à moins de 2 millions d’électeurs, on ne donne pas cher des chances de survie pour cette antique machine née en 1971 sur les ruines de la SFIO.

 

Le PS a beaucoup péché. Electoralisme débridé, opportunisme, difficulté à se renouveler, guerre des egos, byzantinisme tactique, impuissance à expliquer les vertus d’une social-démocratie moderne, divisions innombrables : la liste est interminable des errements auxquels les héritiers de Blum et de Mitterrand se sont livrés depuis une ou deux décennies. Mais raisonnons à rebours. La mort du PS une fois prononcée, la gauche se retrouve scindée en deux courants étrangers l’un à l’autre, chacun fondé sur le charisme d’un homme, qui tient un discours collectif mais décide en fait pratiquement seul des destinées d’une moitié du «camp progressiste». Un camp qui n’en est plus un, au demeurant, puisqu’il est divisé en deux moitiés d’orange que personne ne peut réunir pour retrouver le fruit d’origine. Une gauche radicale homogène d’un côté, un centre ambigu tiraillé entre droite et gauche, social-libéral ou libéral-social, de l’autre.

 

Au lieu d’un parti qui tente de trouver tant bien que mal un projet commun, on aura deux organisations sans passé ni héritage, sans mécanisme de synthèse, médiatiques avant d’être militantes, qui assurent à la droite d’avoir en face d’elle une opposition coupée en deux. Peut-être est-ce inévitable, peut-être le glas de l’histoire a-t-il déjà sonné pour les survivants de la rue de Solférino. Mais avant de s’y conformer, la gauche qui ne renonce pas tout à fait à un espoir commun doit y réfléchir à deux fois. Dans un mois, si le candidat désigné ne convainc pas, s’il patauge dans le discrédit, il sera temps de constater le décès de l’ancienne gauche. En attendant, il serait bon de laisser une chance, non à un appareil, mais à une idée. Celle de la gauche, qui peut encore servir en se réinventant.

 

Macron : une dynamique électorale en marche

 

Depuis l’automne, l’ancien ministre de l’économe attire des partisans de tout bord et des abstentionnistes.

 

Absent des débats de la primaire à gauche, Emmanuel Macron s’est glissé tel un fantôme dans chaque interstice de la campagne. Le vainqueur de ce scrutin aura en effet à affronter celui qui veut faire « bouger les lignes » et bouleverse les repères partisans de la Ve République.

 

Se positionnant comme un candidat « ni de droite ni de gauche », M. Macron aurait pu pâtir de ses responsabilités passées. Or ses 5 points gagnés en quelques semaines (17 % d’intentions de vote à la mi-janvier contre 12 % en septembre) confirment qu’il s’est installé dans un fauteuil de troisième homme, prêt à contester la place qualificative du second tour à François Fillon ou Marine Le Pen. Comment, depuis sa démission du gouvernement, fin août, puis sa déclaration de candidature, en novembre, M. Macron est-il parvenu à séduire un électorat encore très hétérogène et ne répondant à aucune grille de lecture des mobilisations partisanes ?

 

En suivant les mêmes Français depuis quatorze mois, le panel électoral du Cevipof permet de répondre à ces questions. Aujourd’hui, M. Macron est crédité de 17 % des suffrages au premier tour de la présidentielle dans un scénario où Manuel Valls remporterait la primaire à gauche, et de 19 % à 21 % en cas de victoire d’Arnaud Montebourg ou de Benoît Hamon. La dynamique Macron repose sur un double mouvement d’électeurs dont l’intention de vote a changé et de mobilisation de nouveaux partisans qui déclaraient jusqu’alors vouloir s’abstenir.

 

Entre septembre 2016 et janvier 2017, 40 % des électeurs ont maintenu leur choix sur la candidature de M. Macron. La trajectoire des 60 % de nouveaux électeurs est plus surprenante car elle illustre la capacité de siphonnage du leader d’En Marche !. En effet, à l’automne, 13 % d’entre eux avaient déclaré voter François Bayrou, 11 % François Hollande, 7,5 % Nicolas Sarkozy, 3,5 % Jean-Luc Mélenchon, et 11 % s’abstenir. Evidemment, ces mouvements reposaient sur une offre électorale qui a depuis profondément évolué.

 

ur une période plus récente – entre décembre et janvier 2017 –, M. Macron parvient à consolider la majeure partie de son électorat (autour de 60 %) et attire 13 % d’électeurs qui déclaraient jusque-là voter M. Valls, 10 % François Fillon, 5 % Marine Le Pen, 4 % Jean-Luc Mélenchon, et 5,5 % s’abstenir.

 

Ces résultats soulignent les contours de l’espace électoral de M. Macron, qui vont d’une gauche sociale-démocrate, orpheline du retrait de François Hollande, à un centre droit, composé de sympathisants de M. Bayrou et de M. Juppé. Par ailleurs, M. Macron parvient aujourd’hui à s’imposer comme le seul candidat capable de (re)mobiliser un électorat qui avait trouvé refuge dans l’abstention, non pas par indifférence pour l’élection présidentielle mais plutôt par contestation de l’offre proposée.

 

D’un point de vue sociodémographique, le profil de ces 40 % de nouveaux électeurs conquis par M. Macron depuis décembre est majoritairement féminin (57 %) et âgé de plus de 50 ans (53 %). Cet électorat volatil se compose avant tout de retraités (32 %), puis d’employés (16 %), de cadres supérieurs (14 %), de professions intermédiaires (14 %), d’inactifs (13 %) et d’ouvriers (8 %). Il attire presque autant de personnes très diplômées (42 %) que faiblement diplômées (37 %).

 

Souvent présenté comme le candidat des bourgeois bohèmes par ses détracteurs, M. Macron continue certes de capitaliser sur le vote urbain (38 % résident dans des villes de plus de 200 000 habitants), mais réalise des gains substantiels dans la France rurale (38 % dans les communes de moins de 10 000 habitants).

 

Enfin, le profil économique de ses nouveaux sympathisants correspond à des catégories sociales favorisées (+ de 50 % perçoivent un salaire supérieur à 2 500 euros par mois), qui disposent d’un patrimoine matériel (77 % sont propriétaires) et financier (21 % possèdent un portefeuille de valeurs mobilières). Par-delà leur origine sociale et économique, les transferts vers M. Macron ne partagent pas les mêmes opinions religieuses, puisque 54 % d’entre eux revendiquent une foi catholique et 42 % se déclarent sans religion.

 

Parangon de la sociale-démocratie ou incarnation d’une démocratie libérale en dehors des partis traditionnels, M. Macron occupe aujourd’hui un espace idéologiquement hybride lui permettant d’attirer des électeurs séduits autant par la nouveauté que l’opposition à la tripartition de la vie politique française. Même s’il est encore trop tôt pour parler de quadripartition, la dynamique en faveur de l’ancien ministre de l’économie s’appuie sur une redoutable mécanique de siphonnage d’électeurs de la gauche et du centre historiques, en manque, chacun, d’un représentant incontesté à l’élection présidentielle.

 

Martial Foucault

Professeur à Sciences Po et directeur du Cevipof

 

Macron lance un appel à ses «marcheurs» pour les investitures aux législatives

 

Emmanuel Macron met un coup de pression aux élus socialistes. A quelques heures du dernier débat de la primaire à gauche et à trois jours du premier tour de ce scrutin, le candidat d’En marche a dévoilé les règles qui régiront les investitures accordées par son mouvement aux législatives de juin 2017. Avec un objectif clair : avertir ceux qui au PS hésitent à le rejoindre qu’ils ne doivent pas compter sur les traditionnels arrangements de dernière minute. «Je ne négocierai aucune circonscription contre un ralliement», insiste Macron qui entend présenter des candidats dans les 577 circonscriptions. «Il n’y aura aucun accord d’appareil entre En marche et quelque parti que ce soit.»

 

Dans la bouche du délégué général du mouvement, Richard Ferrand, le message prend une allure d’ultimatum : «Un élu socialiste qui se décide avant le 29 janvier fait acte de conviction. Après, c’est un acte de contrition.» En clair, si les députés sortants sont les bienvenus, toute étiquette confondue à l’exception du FN, ceux qui tarderaient trop à se manifester pourraient bien se retrouver le bec dans l’eau.

 

C’est qu’Emmanuel Macron a décidé de renouveler profondément l’exercice. Jeudi midi, son mouvement a mis en ligne un appel à candidature pour les législatives. «Tous les marcheurs qui veulent s’engager peuvent s’inscrire en ligne», précise Macron qui se félicite d’être «la seule force politique à avoir établi des formalités aussi claires et accessibles». Une commission nationale des investitures sera mise en place «dans les prochains jours» pour procéder à l’examen des dossiers par «vagues successives» à compter de début février jusqu’au premier tour de la présidentielle de façon à «construire une majorité de projet pour gouverner et traduire en actes notre engagement collectif et citoyen».

 

Pour les sélectionner, cinq critères seront pris en compte. Et d’abord le «renouvellement» : Macron ambitionne ainsi d’attribuer «plus de la moitié» des investitures d’En marche à la société civile «pour faire émerger des personnalités engagées et talentueuses». Les candidatures retenues devront aussi répondre à l’exigence de «parité stricte» au niveau national, de «probité» (une inscription au casier judiciaire ou une condamnation à une peine d’inéligibilité étant rédhibitoires), de «pluralité politique» (toutes les tendances du mouvement doivent être représentées) et enfin d’«efficacité». «Tous les candidats investis signeront le même contrat avec la nation que moi», explique Macron «Ils ne pourront pas exprimer un désaccord avec le cœur de notre projet.» Une discipline, à l’en croire, plus à même que les primaires d’éviter l’apparition de «frondeurs au premier jour».

 

Leïla Slimani : « Je suis féministe et je le revendique »

 

ELLE. Qu'est-ce que le prix Goncourt a changé dans votre vie ?

 

Leïla Slimani. Le regard qu'on a sur moi. Je me suis retrouvée nimbée d'une chose à l'aura et à l'odeur très particulières, qui s'appelle le succès, et qui attire irrésistiblement les gens. Mon livre n'est plus seulement un roman qui s'appelle « Chanson douce », il est devenu « le Goncourt » que les gens viennent acheter pour leur mère !

 

ELLE. Vous êtes seulement la douzième femme à recevoir ce prix et la première enceinte, est-ce que cela a un sens pour vous ?

 

Leïla Slimani. Oui, dans la mesure où je peux témoigner du fait qu'il est possible d'être une femme et de consacrer sa vie à la littérature. Un homme qui écrit, c'est normal, mais une femme qui choisit de faire garder son enfant pour écrire, pour beaucoup, c'est une égoïste. Moi-même, j'ai mis du temps à dépasser une certaine culpabilité. Combien de fois j'ai entendu : « C'est bien, comme tu écris chez toi, tu peux t'occuper de ton fils ! » Eh bien non, justement parce que j'écris, je ne peux pas m'en occuper. Du coup, regardez le nombre d'auteures qui ont dû renoncer à la maternité. Oui, je peux écrire, être enceinte, avoir une vie de famille, sans être une mère indigne. Il me semble que c'est un combat qui en vaut la peine.

 

ELLE. Vous êtes féministe ?

 

Leïla Slimani. Je suis féministe et je le revendique. Je pense souvent à Simone de Beauvoir disant que nous aurions tort de penser que les grands combats sont derrière nous et qu'il ne reste plus que des luttes bourgeoises à mener. Et je me rends compte que, oui, c'est vrai, on devient femme. Dans la confrontation avec la société - dans la façon qu'on a de trouver un travail, d'avoir des relations avec son patron, de s'occuper des enfants -, par petites pierres, s'impose ce qu'on voyait de loin et de manière abstraite comme étant la condition féminine. Et ça m'intéresse aussi en tant que romancière.

 

« OUI, JE PEUX ÉCRIRE, ÊTRE ENCEINTE, AVOIR UNE VIE DE FAMILLE, SANS ÊTRE UNE MÈRE INDIGNE »

 

ELLE. Vous êtes entrée en littérature sans passer par la case premier roman autobiographique, pourquoi ?

 

Leïla Slimani. Parce que je suis maghrébine et que je n'avais pas envie qu'on m'identifie uniquement à ça. Je me disais : tu vas tisser la toile dans laquelle tu vas t'enfermer, alors que tu as devant toi un horizon bien plus large. Toni Morrison a confié que son roman « Paradis » avait été mal compris à sa sortie parce qu'on lui reprochait de ne pas donner la couleur de ses personnages. Comme s'il existait une littérature blanche ou noire ! Je crois qu'il faut montrer qu'on n'est pas conditionné seulement par nos origines, que notre destin, c'est autre chose, c'est l'amour, les sentiments, la peur, la transgression. C'est ça que j'ai envie de raconter, sans rien renier pour autant de ce que je suis. J'aurai bien le temps de raconter mon histoire.

 

ELLE. Quelle est votre histoire ?

 

Leïla Slimani. Ma grand-mère maternelle alsacienne a rencontré mon grand-père pendant la Seconde Guerre mondiale. Il faut imaginer un spahi [cavalier, ndlr], en sarouel, qui traverse la Méditerranée pour venir faire la guerre en France, en Alsace, dans le village où habite ma grand-mère avant d'être envoyé dans un camp en Allemagne. Lorsqu'il a réussi à s'enfuir, il s'est réengagé dans l'armée, juste pour venir la chercher. Il faut aussi imaginer la tête de mon arrière-grand-père, grand bourgeois alsacien et bon vivant, lorsqu'il a vu débarquer ce petit Africain ! Mes grands-parents se sont installés en 1945 dans la médina de Meknès. Ils ont eu trois enfants qui se sont mariés avec des gens de nationalités et de religions différentes.

 

ELLE . Et toutes les religions cohabitaient ?

 

Leïla Slimani. Chacun pratiquait de manière intime sa religion. Ma grand-mère était catholique et, en même temps, elle respectait l'islam, elle a même fait le pèlerinage à La Mecque. À Noël (elle ne rigolait pas avec cette fête, ma grand-mère !), mon grand-père musulman se déguisait en père Noël, juché sur un âne. Et il jurait en arabe pour le faire avancer !

 

ELLE. Vous dites : « Je suis née musulmane », qu'est-ce que cela signifie ?

 

Leïla Slimani. Mes parents m'ont transmis la culture marocaine, ancestrale, hédoniste, avec des valeurs magnifiques : avoir le sens de l'hospitalité, avoir de l'attention pour son prochain, aimer être ensemble, rire avec ses enfants. J'ai été élevée dans l'amour sensuel des paysages, des odeurs, des goûts. Après, dans un pays comme le Maroc, on naît musulman, c'est la religion d'Ètat, on n'a pas le choix, et les actes que l'on commet sont jugés par rapport à ce que l'on est censé être, c'est-à-dire toujours par rapport à cette religion. Pour moi, c'est une atteinte à la liberté. Lorsque je dis cela, certains Marocains y voient une attaque contre le pays, mais non, c'est seulement vouloir vivre en toute liberté. Et je crois que la liberté n'est jamais une menace.

 

ELLE. Après les attentats du 13 novembre 2015, vous écrivez dans la revue « Le 1 » : « intégristes, je vous hais », ne prenez-vous pas un risque ?

 

Leïla Slimani. Si, car j'ai de la famille et des amis au Maroc mais, à ce moment-là, je pensais que c'était important de le dire. On n'est pas obligé d'être dans une allégeance de la culture d'où on vient. Je peux tout à fait être une bonne Marocaine et haïr les intégristes et la charia. Mais je peux aussi très bien ne pas être gauloise et être une bonne Française. La nationalité n'est pas un mérite, c'est un ensemble de valeurs et une inscription dans une histoire.

 

ELLE. Depuis que les attentats meurtrissent la France, vous regarde-t-on différemment ?

 

Leïla Slimani. Oui ! Avant, j'étais une Arabe, avant j'étais maghrébine, avant 'étais une beur. Aujourd'hui, je suis devenue musulmane. Je refuse qu'on m'enferme dans ce qui relève d'un choix privé. Quand on me demande : « En tant que musulmane, vous en pensez quoi ? », ça me rend folle. Peut-être que je suis bouddhiste, c'est parce que je m'appelle Leïla Slimani que vous vous autorisez à me parler comme ça ? 'est toujours dangereux quand une religion devient une identité et 'est entrer dans le jeu des islamistes que d'assigner les gens à être es musulmans. Comment voulez-vous que soient libres des gens ue, d'emblée, on ne voit pas comme libres ?

 

ELLE. Petite fille, avez-vous étudié le Coran ?

 

Leïla Slimani. Oui, c'était obligatoire, même à l'école française. L'islam, tel qu'on le pratiquait autour de moi, plein de joie, de compassion et d'amour, a infusé dans mon éducation et dans ma culture. J'ai fait un mariage musulman au Maroc, une cérémonie magnifique d'un raffinement inouï, avec six robes. C'était quelques années après la mort de mon père, et respecter la tradition m'a donné l'impression qu'il était là, avec moi.

 

ELLE. Quand êtes-vous venue en France ?

 

Leïla Slimani. Je suis arrivée pour faire mes études et j'ai découvert à Paris une solitude profonde, noire, durable. Des soirées qui se succèdent sans personne à qui parler. Tout était si grand, je me sentais mal à l'aise partout. Et, en même temps, les gens avaient l'air si libres. Pour la première fois de ma vie, j'ai vu des couples s'embrasser sur la bouche dans la rue, pendant des minutes et des minutes. Et des femmes très belles marcher seules le soir. Je me disais : ça doit être merveilleux d'être eux, il faut que je trouve le moyen de devenir eux !

 

ELLE. Au Maroc, une jeune fille ne se promenait pas seule dans la rue ?

 

Leïla Slimani. Dans mon milieu, jamais de la vie. À la télévision et au cinéma, les scènes d'amour étaient coupées, du coup, les films étaient très courts et souvent incompréhensibles. Le monde de mon enfance était d'une grande pudeur mais, aujourd'hui, il est devenu moralisateur. On ne s'embrassait pas dans la rue parce que ça ne se faisait pas, aujourd'hui, c'est parce que c'est mal, ce n'est pas du tout la même chose, c'est ça qui me fait peur. Un baiser en public peut vous mener en prison.

 

ELLE. Vous avez écrit un livre de témoignages de Marocaines, pourquoi ?

 

Leïla Slimani. Pour donner une voix à celles qui n'en ont pas. Un jour, à la fin d'une conférence à Rabat, une dame est venue me parler. J'ai trouvé ses mots tellement beaux que j'ai eu envie de les restituer et de rencontrer d'autres femmes, mariées ou célibataires, actives ou pas, qui portent le voile ou pas, pauvres ou riches. Je veux qu'on entende leur souffrance.

 

« LA LITTÉRATURE NE PEUT PAS CHANGER LE MONDE MAIS PEUT-ÊTRE PEUT-ELLE CHANGER CEUX QUI LA LISENT. »

 

 

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