Monsieur,
Comme phonétiquement votre nom sonne Morel le patronyme du François que j’aime, j’ai tenu à en épeler la finale.
En parodiant ce cher Jack Lang, le plus mitterrandolâtre des mitterrandolâtres, Aquilino Morelle vous êtes passé de l’ombre à la lumière le jour où vous fûtes viré sans ménagement par votre maître élyséen pour des motifs domestiques sur lesquels je m’abstiendrai d’ironiser.
Sans aller à assimiler votre fonction au rang de domestique, comme moi vous fûtes, et vous êtes encore, un serviteur de l’État Républicain, il vous rémunère pour ce faire : vous êtes fonctionnaire de l’IGAS.
Vos origines modestes, né dans une famille d'immigrés espagnols asturiens vous passez toute votre enfance dans le quartier de Belleville, votre père était ouvrier affûteur chez Citroën à Nanterre, votre belle méritocratie, docteur en médecine, interne à l’AP-HP, Sciences Po, l'ENA dont vous sortez en 1992 dans la promotion Condorcet pour intégrer l’IGAS, ne vous confèrent aucun droit supplémentaire mais, bien au contraire, vous marque d’une exigence absolue, le devoir d’exemplarité.
Rassurez-vous, je ne vais pas troquer ma plume pour celle d’un procureur, mais permettez-moi de vous dire que dans le domaine de l’exemplarité je ne vous proposerais pas comme modèle à mes petits-enfants.
Comme tant d’autres de vos pairs de la haute fonction publique vous avez joyeusement pratiqué, sous son beau manteau protecteur, le mélange des genres : la politique, donc engagé, et le service de l’État en tant qu’Inspecteur Général, donc soumis au devoir de réserve.
Attention, je ne vous reproche pas de vous être engagé, de vous être présenté à une élection, c’est le droit de tout citoyen, mais d’avoir, comme tant de « petits marquis » de la rue de Solférino, navigué, bien au chaud, dans les délices des oripeaux d’éminence grise.
Ces allers-retours sans risque, même si votre séjour chez Euro-RSCG m’interrogent, vous revenez vite à vos amours et prenez la roue du flamboyant Montebourg qui se plaça comme 3e homme lors de la primaire de la Gauche et rallia sans grand état d’âme le futur vainqueur.
Vous profitez de ce ralliement opportuniste pour faire votre nid auprès de François Hollande, on vous dit « nègre », et vous vous retrouvez dans le cœur du pouvoir au palais de l’Élysée. Belle revanche qui, même si vous n’en conviendrez jamais, comme tant d’autres que j’ai pu observer dans mes fonctions de Directeur de cabinet, vous grise. On vous craint, vous vous comportez, même si aujourd’hui vous dites le regretter, comme un insolent et imbuvable « petit marquis » à qui, tout ou presque, est permis.
Mais ça c’est votre problème, je vous laisse le soin chaque matin en vous regardant dans la glace d’estimer que vous avez été à la hauteur de vos fonctions de conseiller du Prince.
Mon propos matinal va bien au-delà de votre comportement domestique. Ce que je conteste c’est votre impudence lorsque vous affirmez dans votre livre L'Abdication et dans une interview au journal Le Monde :
« …la véritable rupture d'opinion entre Hollande et les Français, qui s'est produite dès la fin de l'année 2012. Dès cette date, les Français se sont détournés du président car ils ne lui pardonnaient pas sa première abdication, l'abdication de sa volonté d'exercer réellement le pouvoir.
- Comment s'est manifestée -celle-ci, selon vous ?
Très vite. Alors qu'il bénéficiait de l'onction du suffrage universel, alors qu'au premier G8, à Camp David, le 19 mai 2012, le président Obama l'avait assuré de son soutien et avait plaidé pour une relance économique en Europe, alors que les dirigeants italien et espagnol souhaitaient qu'il prenne la tête de l'Europe de la croissance, François Hollande a, au contraire, fait le choix de la résignation. Il n'a jamais voulu devenir ce leader d'une nouvelle Europe. Et au sommet européen du 29 juin 2012, il a enterré tout espoir de changement en se résignant à l'austérité, en acceptant, sans véritable renégociation, le pacte budgétaire européen imposé par Merkel et signé par Sarkozy. Ce renoncement inaugural a précédé et déterminé tous les autres. C'en était dès lors fini du discours du Bourget. La vérité est simple et cruelle : François Hollande ne voulait pas exercer le pouvoir ; il voulait seulement être président de la République. »
Mais alors, sieur Morelle, qu’êtes-vous resté faire tout ce temps dans cette galère ?
Comme votre maître « félon », qui ne voulait être que Président de la République, vous êtes resté pour n’être qu’un conseiller du Président de la République. Là, j’ose écrire un domestique de luxe.
Vous avez donc travailler pour un « traître »...
De grâce ne venez pas me dire que vous êtes resté parce que vous estimiez pouvoir infléchir le cours des choses. Argument dérisoire et peu glorieux, pourquoi avoir attendu de vous faire salement virer, oser dire que votre exfiltration des ors de la République, comme celle de votre mentor, de « génocide du Rwanda » ?
Mais pour qui vous prenez vous, Aquilino Morelle ?
Vous n’avez été ce que vous avez été que par le fait du Prince, alors que vous soldiez vos comptes dans un livre, qui se veut un réquisitoire politique impitoyable contre le président ayant, selon vous, fait perdre son âme à la gauche, est de ces entreprises que l’on peut qualifier de minables.
Pire, c’est un exercice égotique sans l’once d’intérêt !
Je vais vous faire une confidence, passé l’instant médiatique de la sortie de votre opus, vous allez retrouver l’ombre besogneuse de l’IGAS.
Qui se souviendra d’Aquilino Morelle ?
Pas grand monde, pas grand monde, sauf si vous êtes vraiment un militant de votre cause, Morelle, et que vous quittez le cocon douillet de l’IGAS et des « ménages » accessoires, pour vous engager vraiment, pour vous faire élire par vos concitoyens, abandonnant ainsi votre posture de conseiller du Prince répudié.
Sans cet acte fondateur vos écrits, vos paroles, aussi brillants soient-ils, ne seront, ni plus ni moins, que ceux d’un citoyen lambda, de monsieur tout le monde quoi.
Je n’ai pas de mots pour vous saluer mais je le fais par simple urbanité.