Attendu que je n’ai de comptes à rendre à qui que ce soit…
Attendu que je n’organise aucun salon, que je ne chronique dans aucun magazine ou spécial vins, que je ne fais pas la chasse aux encarts publicitaires…
Attendu que je ne fais pas de ménages…
Attendu que je n’ai pas de prix…
Attendu que je n’ai que peu de goût pour le concubinage constant de l’Administration avec la Profession agricole…
Attendu que j’aime ma petite planète, ses vers de terre, ses petites bestioles, ses fleurs et ses herbes folles…
Attendu que j’aime boire bon et sain.
Selon une jurisprudence bien établie je m’occupe de ce qui ne me regarde pas.
Aujourd’hui je le fais parce que, par-delà le cas d’espèce de Dominique Derain, se pose un problème de fonds : le droit protège-t-il un métayer face à un propriétaire qui désapprouve ses choix ?
Dominique Derain pratique la biodynamie, c’est son choix, ce que n’a pas eu l’heur de plaire au propriétaire de la parcelle de vigne cadastrée AD 152 lieu-dit « En Vosne » de 1802 m2 AOC Gevrey-Chambertin.
L’EARL Derain la loue en vertu d’un bail en métayage de 9 ans, depuis 1995, à un lointain GFA du nord de la France.
Que ce propriétaire, un héritier, n’aima pas les vins de Derain c’est son droit, mais je ne vois pas au nom de quoi il est venu chercher des poux sur la tête de Dominique, sauf à ce que la pratique d’une viticulture respectueuse de son environnement se révéla moins juteuse pour lui que celle que l’on qualifie bien rapidement de conventionnelle.
Je ne sais je ne pratique plus les baux ruraux et je ne fais aucun jeu de mots Dominique…
En 2006, il en fut pourtant ainsi, procédures à l’encontre de Dominique Derain pour aboutir le 29 octobre 2008 à un protocole d’accord signé entre les deux parties, qui prévoyait que Dominique Derain devait libérer sa parcelle après la vendange 2015.
Pour faire quoi de ces terres ?
- Que le propriétaire les cultivât lui-même ?
- Bien sûr que non, tout simplement les confier à un autre locataire plus docile, plus conventionnel quoi…
Et c’est là que notre droit, avec la complicité de l’Administration et des Organisations Professionnelles agricoles, ne protège en rien les choix culturaux de Dominique Derain. Des choix qui sont bons pour notre petite planète et qui participent à la notoriété de la Bourgogne dans un monde normalisé.
En effet, alors que le protocole d’accord ne l’empêchait pas de postuler pour une nouvelle attribution, l’Administration a oublié de l’en prévenir. Tiens donc ! Je ne vous parlerai ni de passer la salade pour recevoir la rhubarbe, c’est déjà pris.
Comme le fait remarquer avec pertinence Dominique Derain « Il faudra m’expliquer comment un domaine qui a déjà le double de ma surface de production, possédant des Grands crus, des 1ier crus et des appellations villages sur Gevrey-Chambertin est prioritaire sur mon exploitation.
« J’attire votre attention sur le fait que cette parcelle de 28 ares (surface minimum reconnue selon les critères de la SAFER pour permettre de vinifier dans de bonnes conditions) va se retrouver amputée des 2/3. Je suis propriétaire des 10 ares restants. »
Voilà le problème posé, outre que cette parcelle, hautement valorisée par Dominique Derain dont les vins sont reconnus et appréciés par la restauration et les amateurs, va quitter le petit monde de la viticulture propre, celle hautement souhaitée par Aubert de Vilaine pour assoir la réputation des Climats de Bourgogne, pour retomber dans le marais de la viticulture conventionnelle.
Un confetti, un timbre-poste, me rétorquera-t-on !
Peu me chaut c’est la méthode que je conteste, et je la conteste d’autant plus qu’elle se fait sous le couvert de la puissance publique.
C’est pour cette raison, alors que les lions sont lâchés : Dominique Derain vient de recevoir une assignation en référé devant le TGI de Dijon à l’instigation de son bailleur, que je mets mes petits pieds dans le plat.
Amis de la Toile soyons solidaires, mobilisons-nous et déclarons « Touche pas à mon Derain ! »
Affaire à suivre…
Lire ou Relire la chronique : Dominique Derain vigneron bourguignon me déclare «J’aime l’are !» du père Grandet à François Pinault l’amour de l’are…