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19 décembre 2015 6 19 /12 /décembre /2015 06:00
Bolshoi Ballet- Coppelia: Mazurka

Bolshoi Ballet- Coppelia: Mazurka

Mon addiction aux pâtes, les sèches surtout, est maintenant pour vous un secret de Polichinelle.

 

L’une des pires tortures que l’on m’a infligé dans ma belle et insouciante jeunesse c’est de me mettre sous le nez un plat de pâtes « colle d’affiche » ; tel fut le cas lorsque je fus pensionnaire et, quelques temps plus tard, chez une amie qui enseignait la cuisine aux filles dans une école ménagère. Pas le choix, au réfectoire il était hors de question de faire des restes, et chez mon amie je me devais, par politesse, de vider mon assiette. Surtout que mon amie savait que j’aimais beaucoup les pâtes.

 

Cuire les pâtes n’est pas à la portée du premier venu.

 

Tout d’abord il est essentiel de s’adapter aux multiples formes des pâtes : « il y a les longues, il y a les courtes, comme dans la vie ; et il y a les rondes et puis les plates, il y a toutes les formes, pompes et circonstances, comme le montrent des planches gravées italiennes du XVIIIe, du XIXe et souvent du XXe. »

 

 

 

 

Pour répondre à la question-titre je vais transcrire la prose de Cul in air d’un certain Jean-Paul Manganaro.

 

La casserole à pâtes : « elle peut être haute ou large, il faudrait qu’elle ne serve qu’à ça, un peu comme une poêle à frire, la haute pour les spaghetti, la large pour les courtaudes et les naines, ne vous emmêlez pas les pattes dans cette histoire. »

 

L’eau : « abondante, généreuse, pas minérale ni gazeuse, débit du robinet – à moins que vous n’aimiez l’eau de pluie et de parapluie, dans ce cas profitez des grandes pluies saisonnières –, trois quarts de la casserole quelle que soit son ampleur... »

 

Le sel : « une cuillerée à soupe de sel pour deux litres, trois cuillerées pour quatre et ainsi de suite, mais pas plus, apprends définitivement que le pas assez salé tu peux le rattraper mais que tu ne rattrapes jamais le trop salé, ni le petit salé d’ailleurs. »

 

Le jeté de pâtes : « mets ensuite sur un feu audacieux, vif, libertin et péremptoire, dominateur en somme, porte à ébullition et quand cela bout à grand bouillon alors seulement jette les pâtes. Oui, jette-les, d’un coup de main assuré et tranchant, qu’elles aillent au bain toutes ensemble, à leur dernière fêtes, comme les gens à l’eau dans les îles du Levant, comme de jolis pingouins ou manchots dans les vagues antarctiques, comme les têtards qui tous en même temps rafalent l’espace glauque et l’aquatique. »

 

La mazurka des pâtes : « faut vraiment qu’elles aient de l’espace, faut que les pâtes dansent leur mazurka et non qu’elles soient assises comme dans un cabinet médical ou agenouillées sur un prie-Dieu de paille, ou qu’elles piétinent en se cognat les unes contre les autres comme dans le métro à l’heure qui pointe et vraiment – vraiment – c’est pas la peine de gaspiller votre huile… en en versant quelques gouttes pour qu’elle n’encollent pas : c’est une question de place, il leur faut la largesse des salons où l’on danse et non l’étroitesse des prisons où l’on s’entasse et s’agglutine. »

 

Le temps de cuire : « la méthode ancienne est la suivante : faut goûter la cuisson, en prenant une fourchette si c’est des pâtes longues, et d’un geste leste et sans affectation, saisir le fil de pâte et l’attraper de l’index et du pouce de la main libre et porter ça sous la dent et tailler, du bas vers le haut – c’est la mâchoire qui mord, l’autre, celle du haut, laisse faire. Les deux dents doivent décider ensemble du terme de cuisson et la pâte se laisser mordre par cette morsure amoureuse, elle doit être tendre, oui, mais ferme, offrir le laps de vie qui lui reste et non sa décomposition de sveltesse et de jeunesse et non ses quatre-vingts de tristesse : d’où que l’on dit des pâtes al dente, pour indiquer ce qui reste de résistance. »

 

« Le geste d’attraper le fil de pâte s’apprend assez vite après quelques ratés ; les pâtes courtes s’attrapent, elles, à la cuillère, c’est donc un jeu d’enfant. »

 

Autre règle générale : « les pâtes ne sauraient être cuites sans que l’on sache avant avec quoi on va les combiner : je veux dire par là que les sauces avec lesquelles vous allez les accommoder peuvent être plus ou moins denses et épaisses, plus ou moins liquides. »

 

Égouttage : « pour les pâtes assemblées avec des sauces denses… retirez de l’eau de cuisson un demi verre d’eau chargé d’amidon… qui vous servira à délayer pâtes et sauce au moment de les mélanger…. Toujours dans ce cas, au moment d’égoutter les pâtes, ce n’est pas la peine de vous démancher les épaules avec la passoire, quelques petits coups suffisent, laissez juste s’écouler l’eau, regardez-la partir et confiez-lui vos secrets, vos malheurs, les petites peines du jour et, délesté(e)s, réjouissez-vous s’autres jours vous attendent, singuliers et pluriels. »

 

« Faites le contraire, c’est-à-dire secouez fermement la passoire si votre sauce est plutôt liquide, ce qui sied à une sauce, surtout huileuse ou à la tomate. »

 

Les doses : « pour un appétit normal, comme dans notre république actuelle, une dose correspond à cent, cent-vingt grammes, quatre-vingt si votre convive frôle l’anorexie, cent cinquante à deux cents si c’est un molosse, après refusez ; les pâtes en cuisant doublent de volume, pesez si vous voulez vos pâtes cuites, et vous verrez. »

 

Le mélange : « avec les pâtes longues… tu fais ça avec deux fourchettes que tu enfonces bien en-dessous où se trouve la sauce et tu ramènes à la surface les linguines déjà imbibées et ainsi de suite, fatigue ça tout comme la salade… »

 

Le grain de sel du Taulier : « pour le sel choisissez du gros sel gris ; pour le mélange, lorsqu’il s’agit de ragù, il faut avoir un bon coup de poignet pour opérer le mélange en tenant fermement la queue de la poêle… »

 

Alors à votre choix : pâtes à la poutargue, aux coques, aux moules…

 

Buon appetito

 

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commentaires

W
C'est peut être sous entendu dans ce texte, mais le principal reste d'avoir un grand volume d'eau. Ceux qui ratent leurs pâtes sont souvent responsable d'utiliser des trop petits contenants
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P
Certes, certes, mais je n'avais pas encor inventé le concept du set de table bleu/vert et ne voulait pas m'exposer aux répliques parfois cinglantes d'un Taulier qui, pour les affaires aussi importantes que celle ci, peut se montrer tatillon .
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P
Toujours sympa ces chroniques qui mettent l'eau à la bouche. Mais ou sont les photos, cher Taulier ? Un beau plat de pâtes colorées à la sauce de ton choix, sur les sets de tables bleu/verts ? N'y aurait il pas comme du laisser aller ?
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J
mon cher Pax et ma chronique sur les penne all'arrabiatta : belles photos mais de commentaires de Pax

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