L’abus de communication nuit gravement à la crédibilité…
Lorsqu’on n’a que peu de prise sur la réalité on communique, ça rassure les émetteurs des messages et ça nourrit le flux ininterrompu de ce n’est plus de l’information.
Cette semaine, la « bataille » à l’Assemblée Nationale autour du fameux message sanitaire est le meilleur exemple de ce qu’est un leurre. Ça permet aux décideurs publics de ne rien faire en renvoyant chaque camp dos-à-dos.
Tout le monde SANITAIRE me dit se préoccuper de ma santé, même Vin&Société sauf pour le sujet tabou des pesticides, mais les messages sanitaires ne servent à rien, ou du moins à pas grand-chose, sauf à faire accroire au bon peuple que l’on se préoccupe de sa santé.
La réalité de l’alcoolisme, et l’impuissance publique à la juguler, à prendre en compte les nouveaux facteurs de risques, tout comme le déni des acteurs de ce que toute boisson alcoolisée, aussi civilisée soit-elle, en est un, font que l’on se déporte sur un terrain phantasmatique celui de la liberté de communiquer.
Mais communiquer c’est quoi au juste ?
Un grand sac où l’on mélange joyeusement la liberté d’informer avec celle de nous abreuver de papiers formatés, de futurs copié-collé pour plumitifs paresseux. Pourquoi nous faire prendre des vessies pour des lanternes, la publicité a une fonction claire : faire vendre, et pour vendre il faut que le produit soit consommé afin d’être remplacé.
Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt : l’efficacité de la publicité est conditionnée par son passage dans des canaux à fort impact sur une très large population, pour l’heure la TV et à un degré moindre l’Internet, et par son intensité, son niveau de bruit.
Le vin en France a-t-il les moyens financiers pour affronter une libéralisation de la publicité ?
Je laisse à chacun le soin de vérifier les budgets de publicité des acteurs, y compris d’un des plus puissants : le CIVB.
Reste l’information du public via des journalistes, des vrais, sans conflits d’intérêts, le commerce est une chose, la critique une autre, c’est le véritable enjeu d’une nouvelle approche de la découverte du vin par les consommateurs, chevronnés comme néophytes.
Si la césure était franche, simple à délimiter, ça se saurait. Entre la volonté normale de celui qui vend de plaire, de séduire, de donner envie et la fameuse et inatteignable objectivité du critique, le fossé est de plus en plus étroit dans la mesure où les médias traditionnels papier vivent grandement de la publicité des opérateurs.
Chacun doit vivre et se draper dans une déontologie strictement personnelle n’est pas suffisant. Alors que faire me direz-vous ? Accepter l’état de fait, ne pas faire semblant, assumer, redonner de la vigueur à la critique, casser le lisse, sur lequel tout glisse, de la fameuse communication. Donner prise, émerger du flux uniforme, casser les codes…
Sans être provocateur j’affirme que ce serait bon pour le commerce !
Tout passe, tout lasse, même les fameux primeurs, « machine de guerre » de la place de Bordeaux, patinent, pour Olivier Bernard (Domaine de Chevalier, Pessac Léognan), président de l'UGCB, compte sur « un millésime 2014 de qualité pour relancer la machine ». « La pression est là pour redonner envie d'acheter en primeur un vin livré fin 2016. Les enjeux financiers sont énormes à la propriété et au négoce. Les prix de sortie, connus dans quelques semaines, donneront la réponse. »
« Cette année, c'est relativement simple : ça passe ou ça casse ! Cette année, un redémarrage est crucial pour l'économie du vin à Bordeaux, sinon ça va être un carnage. Il y a 10 négociants qui s'autofinancent sur 120 entreprises, et qui n'ont pas, contrairement aux châteaux, le foncier comme garantie auprès du banquier. La mécanique du primeur est cassée : "Je te finance ton vin deux ans à l'avance, car je suis sûr de faire une plus-value à la sortie, si ce n'est pas le cas, tu le gardes". Au bon prix, le marché primeur existe, c'est une évidence. »
La force du négoce de place, c'est le réseau, ils sont capables de vendre partout sur la planète, c'est un métier. Les châteaux qui pensent pouvoir vendre en direct dans le monde entier se trompent. Le négoce est un maillage très en place qui est irremplaçable du jour au lendemain, c'est le seul à être capable d'équilibrer le marché.»
« La « chasse au dahu » ou « mission absurde » est un canular, qu’on retrouve dans différentes sociétés et cadres institutionnels, qui consiste à pousser les « victimes » à accomplir des actions manifestement stupides.
Les canulars combinent deux traits caractéristiques de la socialité humaine : la tromperie et l’humour. Considérés comme des blagues, ils « sont révélateurs des situations sociales dans lesquelles ils se produisent » (Douglas 1968 : 366). J’avancerai qu’une blague particulière – la « mission absurde » – montre que les canulars peuvent aussi être l’expression de traits plus généraux de la communication et de la cognition humaines. La mission absurde est une manière humoristique d’exploiter un aspect vulnérable de la confiance dans la communication au sein de contextes sociaux où existent des asymétries épistémiques entre les victimes et les farceurs. »
Victimes et farceurs lisons Jacques Dupont
« Cette semaine, c'est celle des minibus Mercedes, des voitures noires et des hommes tristes. Mis à part les acheteurs de la grande distribution qui bossent dur tout en ne cachant pas leur plaisir de goûter des grands vins et de dîner aux vieux millésimes dans les châteaux, nombre de dégustateurs font la tête d'enterrement qu'affectionnent les mannequins masculins et les bassistes des groupes de rock. La fameuse "semaine des primeurs" a commencé lundi, les châteaux sont sur leur trente-et-un, dans les cuisines, on a sorti l'argenterie et dans les vignes un ou deux chevaux en labour se demandent bien ce qu'ils font là. T'inquiète Bijou, c'est juste pour une semaine ! Nous, on a choisi le maquis. Les Crus artisans, l'entrecôte à la braise, bref, les visites dans des appellations où l'on ne croise pas les six cylindres de location. On se régale de médocs pas chers, de montagne-saint-émilion bio à petit prix, et on fait des rencontres émouvantes. Mais cette semaine, comment ne pas évoquer les gros sous, car c'est bien de vente qu'il s'agit avec les primeurs. »
Oui mais l’évènement des primeurs 2014 c’est qu’ «Un seul être vous manque et tout est dépeuplé»
« Alain Raynaud. Le président du Grand Cercle des vins de Bordeaux fait bien sûr référence au dégustateur américain Robert Parker, qui pour la première fois depuis des décennies, n’a pas participé à la campagne des primeurs à Bordeaux. « A titre personnel, j’étais un peu triste. Bob est un grand ami, nous avons commencé ensemble en 1979, on a vu au fil du temps les paliers franchis par Bordeaux. Il est certain que tout le monde est un peu orphelin, cette année. On peut critiquer ses goûts ou déplorer la position qu’il a occupée, mais Robert Parker demeure – malgré ses soucis de santé – un palais exceptionnel, doté d’une incroyable mémoire du goût, et un homme qui a contribué à restaurer une image forte de Bordeaux ».
« Depuis le château la Dominique à Saint-Emilion, Michel Rolland (sortant un mouchoir): « Ne m’en parlez pas ! (puis rires). Bien sûr, c’est un changement après 30 ans de visites régulières et puis surtout il avait une qualité énorme: il avait un impact…Il n’y a pas énormément de critiques du vin qui ont un impact, lui avait un impact mondial ! »
Jean-Luc Thunevin le chouchou dans son garage
Non loin dans le garage de Jean-Luc Thunevin: « C’est vrai que je suis un enfant de Parker, un chouchou ! Mais son arrêt était prévisible, vu son âge, il est né en 47, je l’avais vu, il était un peu fatigué, il avait mal au dos. Donc le fait qu’il ne vienne pas est embêtant pour ses chouchous, donc peut-être pour moi. Mais, en fait il ne manque pas car le Wine Advocate existe toujours, même si ce sont des Singapouriens qui le possèdent, et il a envoyé Neil Martin, son collaborateur qui goûte et note les Bordeaux, toutefois ses notes seront moins importantes par rapport au boss. »
François Lévêque le nouvel agneau à rôtir
« Comme chez les animaux malades de la peste, une victime expiatoire, éternel vieux mythe du sacrifice, est souvent bien utile. L'an passé, ce fut Stéphane Derenoncourt qui fut exposé en place de Grève pour avoir osé - quelle audace ! - susurrer que le millésime 2013 n'était peut-être pas une merveille et qu'au château Malescasse qu'il conseille, cru bourgeois du Haut-Médoc aux stocks par ailleurs garnis, on n'allait point le conserver (…) en 2014, le nouvel agneau à rôtir semble bien être le dénommé François Lévêque qui, du haut de sa chaire de courtier a osé - là encore quelle audace ! -, prétendre que si les prix des très grands crus ne baissaient sérieusement, le marché des primeurs à Bordeaux risquait fort d'avoir du plomb à gros grain dans l'aile...
Hormis le JM Quarin qui me supplie de m’abonner à sa lettre pour tout savoir sur ses 800 vins dégustés, ce dont je me fous comme de ma première chemise, je vous offre un florilège de la ruée vers les primeurs…
La RVF (1)
La RVF (2)
Crédit photo de couverture : Pauillac. Dégustation au château Lynch Moussas© SALINIER QUENTIN