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14 novembre 2016 1 14 /11 /novembre /2016 06:00
Les seuls critiques qui soient passés à la postérité : les jeunes turcs des Cahiers du cinéma  François Truffaut le chef de bande en tête !

Je parle critique vin tout à la fin.

 

Cette chronique est née d’une remarque de l'ex miss glouglou du vin sur Face de Bouc « Je ne suis pas du tout d'accord mais ce post est trop brillant pour ne pas être partagé. »

 

Ce post intitulée Leonard Cohen, celui qui plombait l’ambiance est signé par un critique musical, Jean-Marc Proust qui collabore notamment à Opéra magazine et Slate.fr.

 

Ce gus estampillé critique profite de la disparition de Léonard Cohen pour nous compter sa triste vie d’inconnu au bataillon, avec l'ironie qui sied aujourd'hui dans tout papier qui tente de faire le buzz. Ça s’appelle l’effet d’aubaine permettant de profiter de la vague médiatique pour afficher qu’on existe.

 

Je crois que c’est le lot de la grande majorité des critiques qui restent toute leur vie critique, et la soi-disant brillance évoquée par sa consœur vineuse n’est qu’une dorure aussi mince que le métal argenté. Demain il retombera dans son anonymat.

 

C’est donc en contre-point de son petit exercice de style bien caractéristique de notre temps que je vous offre du François Truffaut, un affreux jojo, dont Henri Langlois confiait avant sa mort « qu’il n’y a que deux grands critiques de cinéma dans ce siècle, François Vinneuil * et François Truffaut.

 

* François Vinneuil nom de plume de Lucien Rebatet dans L’action Française puis Je suis Partout, antisémite notoire.

 

Pour lui, comme pour les jeunes turcs, ces années furent des années grises « nous ne vivions pas d’espoir, nous ne vivions même pas » déclare Éric Rohmer. Pour eux « la vie c’était l’écran, c’était le cinéma, c’était la discussion sur le cinéma, c’était l’écriture sur le cinéma. »

 

Mais, eux, ils n’en sont pas restés là comme notre pioupiou de la critique musicale…

 

Le 2 août 1957 débute à Nîmes le tournage des Mistons avec Bernadette Lafont et Gérard Blain.

 

Le film sortira en salle que le 6 novembre 1958 à la Pagode. La presse est abondante et souvent élogieuse

 

« On l’attendait au tournant. Il se tire avec honneur de l’épreuve. Il ne sait pas encore raconter une histoire solide, mais sa pochade éclate de dons. Il a le sens des images, il sait diriger des acteurs et surtout il possède un « ton » à la fois poétique et cruel » écrit France Soir.

 

Les seuls critiques qui soient passés à la postérité : les jeunes turcs des Cahiers du cinéma  François Truffaut le chef de bande en tête !

Petit retour sur Léonard Cohen :

 

Christophe Lebold maître de conférences à l’université de Strasbourg, spécialiste de littérature américaine a consacré sa thèse de doctorat à Leonard Cohen et à Bob Dylan, et est l’auteur du livre Leonard Cohen : l’homme qui voyait tomber les anges (Ed. Camion Blanc, 2013) écrit :

 

« Les textes de Cohen ont parfois occulté la force de ses propositions musicales. Au début de sa carrière, il a mis en place des paysages métaphysiques dans ses chansons, dont les plus connues, Bird on the Wire, Avalanche… Il a créé des valses noires, en mêlant ses rythmes ternaires ou flamenco avec des choeurs de femmes angéliques qui font contraste avec la gravité de voix. A partir des années 1980, il devient un crooner électro plein d’ironie. Pour moi, c’est un crooner supérieur à Sinatra, il ose le groove hip-hop, sur son dernier album, on peut même danser sur certaines chansons, sans qu’elles perdent pour autant leur dimension métaphysique. Pour moi, c’est un des grands versificateurs de sa génération. J’ai pu accéder à ses archives, et il pouvait travailler pendant des années sur la même chanson, jusqu’à accoucher de métaphores exceptionnelles. »

 

T’as du chemin à faire camarade critique pour te porter à la bonne hauteur…

 

Mais revenons au Truffaut des origines.

 

Le 6 juillet 1955, Truffaut, publie dans la revue ARTS « Les 7 péchés capitaux de la critique »

 

« Il existe, en marge du cinéma, une profession ingrate, laborieuse et mal connue : celle de « critique cinématographique ». Qu’est-ce qu’un critique ? Que mange-t-il ? Quels sont ses mœurs, ses goûts, ses manies ? »

 

« Déclinés en sept points, les réponses de Truffaut suggèrent que la critique n’est ni libre ni intelligente, car elle est ignorante de l’histoire du cinéma comme de sa technique, sans imagination. Elle est professorale et pleine de préjugés. Il va même jusqu’à dire qu’elle est chauvine et vendue au plus offrant, puisqu’ « on  ne fait pas une carrière critique à Paris sans rencontrer un jour ou l’autre Delannoy, Decoin, Cayatte ou le Chanois. »

 

Il illustre son propos de nombreux exemples dont Dutourd, Nourissier, Sadoul, Charensol…

 

Truffaut propose le portrait du « cinéphile non critique », autoportrait révélateur qu’il définit par 2 caractéristiques :

 

  • La radicalité du point de vue « Chacun son système. Le mien m’amène à louer ou à éreinter sans réserve. »

 

  • L’intégrité des jugements. Rendant compte d’un déjeuner de presse pour la sortie de Mauvaise graine de Mervyn LeRoy, en présence de l’auteur, il écrit « Je me souviens d’y avoir très bien mangé, mais la reconnaissance du ventre n’est sans doute pas mon fort, d’autant qu’il vaut mieux n’avoir jamais rencontré Mervyn LeRoy sans quoi on n’a plus aucune envie d’aller voir un film de lui. »

 

Jacques Laurent, qui soutient Truffaut, estime qu’il est un « hussard », l’équivalent pour le cinéma d’un Nimier ou d’un Céline pour la littérature. Dans un éditorial d’Arts publié en février 1955, il écrit qu’il y a 2 sortes de critique de cinéma :

 

  • D’abord une critique dont l’enseigne pourrait être « cuisine bourgeoise ». Elle est brave fille, désireuse de s’accorder avec les goûts du gros public et pratiquée par des gens pour qui le cinéma n’est pas une religion, mais un passe-temps agréable.

 

  • Et puis il y a une intelligentzia qui pratique à l’état furieux. Truffaut en étant un des représentants les plus doués.

 

État de belligérance, tous les assauts lui sont bons puisque le dieu du cinéma reconnaîtra les siens.

 

Tout est parti d’un article-fleuve publié dans les Cahiers du cinéma « Une certaine tendance du cinéma français »

 

Il y attaque frontalement « ces 10 ou 12 films qui constituent ce que l’on a joliment appelé la tradition de qualité… » et retourne contre lui une bonne part de la critique française mais il ouvre la porte des Cahiers aux jeunes turcs dans le sillage d’Éric Rohmer : Jacques Rivette, Jean-Luc Godard, Claude Chabrol…

 

« Entre mars 1953 et novembre 1959, Truffaut publie 170 articles aux Cahiers. Il ne revendique pas un rôle de maître à penser, mais plutôt celui de stratège, allant à la rencontre des cinéastes, attaquant  ses adversaires, faisant valoir son avis, avec fantaisie, mauvaise foi, désinvolture, parfois avec une certaine arrogance, sur tous  les films qui sortent à Paris. Car, qu’il vente ou qu’il pleuve, Truffaut voit en moyenne plus d’un film par jour… »

 

C’est un véritable chef de bande qui avec « un film quotidien, un article tous les deux jours : le jeune homme tient son rythme, travaille toutes les nuits, se bourrant de Maxiton, de cigarettes et de café. »

 

Il confie à Jean Mambrino, jésuite et critique de cinéma.

 

« Au fond je suis très primaire, très inculte (je n’en suis pas fier) ; j’ai seulement la chance d’avoir un peu le sens du cinéma, d’aimer ça, et de bosser dur. Voilà. À part quoi toute considération plus profonde sur le fond passe au-dessus de ma pauvre tête. Comme je suis un autodidacte qui se hait, je ne « m’apprends » rien, ou presque. Ce qui me sauvera, c’est de m’être « spécialisé » très tôt dans le cinéma et d’occuper la place, au maximum, en travaillant toutes les nuits s’il le faut. »

 

Le talent camarade critique !

 

Comme disait ce cher Audiard « Il est plus agréable de dilapider son talent que  de ne pas en avoir.»

 

Du côté critique du vin je classe sans hésitation O.N. du Monde dans la catégorie chère à Jacques Laurent « cuisine bourgeoise »,  brave fille, désireuse de s’accorder avec les goûts du gros public.

 

La chronique sur le bojolo nouveau est de ce tonneau. Ha qu’il est loin le temps de PM Doutrelant !

 

Cette chronique doit tout à mes notes de lecture de l’excellente biographie de François Truffaut signée par Antoine de Baecque et Serge Toubiana chez Gallimard 1 pavé de 576 pages.

 

Je signale qu'on est tout à fait en droit de détester Léonard Cohen...

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